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Un
homme d'expérience
Originaire
de Châlons-sur-Marne en Champagne, Jean Talon, fils de Philippe
Talon et d'Anne de Bury, naît en 1625 et est baptisé
le 8 janvier 1626. Il fait ses études à Paris, au
collège de Clermont, dirigé par les Jésuites,
et occupe ensuite plusieurs postes dans l'administration militaire
: commissaire des guerres en Flandre, intendant de l'armée
de Turenne, commissaire du Quesnoy, une importante place forte qu'il
défend contre les Espagnols et, en 1655, à l'âge
de 30 ans, intendant du Hainaut, un important territoire qui s'étend
au nord de la France et englobe une partie considérable de
la Flandre (Belgique).
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Un
poste prestigieux
Créé
au cours des années 1630 par le cardinal de Richelieu (1585-1642),
chef du Conseil du roi Louis XIII et son principal ministre, le poste
d'intendant vise à rétablir et à imposer partout
l'autorité royale pour contrer les derniers pouvoirs du système
féodal qui tire à sa fin. Le rôle de l'intendant
est primordial dans l'administration civile française. Il contrôle
la justice, c'est-à-dire les lois et ceux qui les appliquent,
l'ordre, soit les règlements de tous genres et il veille aux
finances générales de son territoire. La perception
des taxes et des impôts, la réglementation des prix,
les approvisionnements de l'armée, la construction et l'entretien
des routes et des canaux ainsi que l'exploitation des mines sont autant
de domaines qui relèvent de son autorité. En définitive,
l'intendant remplit des fonctions multiples et possède des
pouvoirs très étendus. Talon demeure intendant du Hainaut
pendant 10 années, soit de 1655 à 1665. |
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Une colonie stagnante
La
Nouvelle-France, avant l'arrivée de Jean Talon, est sous-peuplée
et le commerce de la fourrure, assise économique principale
du pays, est désorganisé après la destruction
de la Huronie par les Iroquois entre 1648 et 1650. Les années
qui suivent sont pénibles. Privée de ses intermédiaires
et alliés commerciaux, les Hurons, la Compagnie des Cent-Associés
néglige ses obligations de peuplement tout en accumulant les
déficits. Les coloniaux, quant à eux, réclament
de plus en plus fort des secours militaires pour mater les Iroquois
et rouvrir la route de la fourrure. L'envoi du régiment de
Carignan-Salières et la nomination d'un intendant en Nouvelle-France
s'inscrivent dans la réorganisation complète qu'entreprennent
alors le jeune roi Louis XIV et son ministre des finances, Jean-Baptiste
Colbert. À deux doigts de la ruine, la colonie a besoin d'un
homme d'expérience et d'un serviteur digne de confiance, car
l'intendant doit représenter, selon l'expression même
de Louis XIV, « l'il et la main du roi ». |
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« L'il et la main du roi »
Célibataire
-- et de condition noble -, Jean Talon accepte le poste « d'intendant
de justice, police et finances en Canada, Acadie, île de Terre-Neuve
et autres pays de la France septentrionale » pour un premier
mandat de deux ans qui sera prolongé d'une année supplémentaire,
soit de 1665 à 1668. Il rentre ensuite en France et, à
la demande du roi, revient dans la colonie pour un second mandat,
de 1670 à 1672. Au total, Talon occupe le poste d'intendant
pendant cinq années, un temps très court en regard de
l'envergure de ses réalisations.
Responsable
de la justice et juge en dernier ressort au civil, il domine le
Conseil souverain dont il fait partie - en plus d'en nommer les
membres - de concert avec le gouverneur. Il s'occupe non seulement
de l'application des lois, mais peut aussi les interpréter.
Les règlements internes concernant les marchés, l'hygiène,
la santé et la sécurité publique font aussi
partie de ses attributions. Il administre également la totalité
du budget de la colonie, contrôle les dépenses, même
militaires, de façon exclusive, fixe le cours de la monnaie
et le prix des denrées. En résumé, l'intendant
possède la grande majorité des pouvoirs.
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Un
esprit vif et cultivé
Issu
d'un milieu cultivé, Jean Talon est un homme instruit et un
homme d'esprit. Il participe à une discussion publique de philosophie
au collège des Jésuites à Québec et rédige
des madrigaux et des épigrammes qu'il envoie à la supérieure
de l'Hôtel-Dieu de Québec. Ses goûts artistiques
paraissent assez élaborés, selon les biens évalués
après son décès. Ceux-ci comprennent 98 tableaux
dont les sujets sont majoritairement profanes. Talon est aussi doté
d'un caractère fort, jouit d'une nature enjouée et fait
preuve d'un enthousiasme débordant. Ces qualités constituent
des atouts, compte tenu de l'étendue des pouvoirs qu'il détient,
et elles s'avèrent essentielles à la mission dont il
est chargé. Cependant, elles le poussent parfois à commettre
des débordements qui provoquent l'irritation des coloniaux
et lui valent des rappels à l'ordre de la métropole.
Personnage de confiance de Louis XIV et de Colbert, Talon n'en demeure
pas moins un subalterne et doit limiter ses ambitions aux directives
de ses supérieurs. |
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Une
santé chancelante
L'énergie
et la célérité dont il fait preuve cachent cependant
une santé fragile. On a du mal, en effet, à imaginer
un homme de sa trempe comme un être maladif. Pourtant, à
plusieurs reprises au fil de sa correspondance avec la France, Jean
Talon se dit « fort incommodé » par la maladie.
On ignore la nature de ses maux, car les termes utilisés demeurent
vagues : une « santé attaquée », de «
fortes indispositions », une « infirmité quasi
continuelle » l'accablent à certains moments, alors que
la maladie le « jette dans l'inaction » à d'autres
moments, ce qui donne à penser que la condition physique de
l'intendant laisse grandement à désirer. Son état
de santé constitue d'ailleurs le principal motif de sa demande
de rapatriement au terme de chacun de ses mandats. |
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Des
projets ambitieux
Dès
son entrée en fonction, Jean Talon constate les immenses possibilités
de la Nouvelle-France. Selon lui, Québec, fortifiée
et peuplée comme il se doit, pourrait devenir le centre d'un
État considérable. Mais le ministre Colbert, en France,
le ramène à des vues plus modestes et lui rappelle que
la principale fonction d'une colonie est d'être au service de
la métropole. L'intendant entreprend alors, dans la mesure
de ses moyens, de développer la Nouvelle-France, demeurée
jusque-là embryonnaire à bien des égards. L'essor
qu'il entend insuffler à la colonie repose donc sur l'accroissement
de la population, sur son développement économique et
sur la recherche de nouvelles routes et de nouvelles richesses par
le moyen des explorations. |
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