La collection de dessins et estampes européens et américains, forte de plus de 1 700 dessins et 9 500 estampes, est la plus vaste au Canada et l'une des plus belles en Amérique du Nord. Remarquable autant par son excellence que par sa diversité, elle représente toutes les principales écoles depuis le XVe siècle jusqu'à nos jours.
Le critère principal de collectionnement fixé par le Musée des beaux-arts est la qualité esthétique, mais le Musée s'efforce aussi de constituer un corpus d'œuvres qui soit représentatif d'un artiste particulier. Seule l'analyse d'un échantillon appréciable de la production d'un artiste permet d'éclairer son évolution personnelle et stylistique et d'apprécier l'étendue complète de son expression graphique. Par exemple, le Musée possède maintenant plus d'une centaine d'œuvres de M.C. Escher grâce à une donation de son fils, George A. Escher. Le Musée a également fait l'acquisition d'un grand nombre d'estampes françaises du XIXe siècle dans le but précis d'illustrer l'évolution de techniques de gravures comme la lithographie.
Pour sa collection de dessins, nettement plus modeste, le Musée a la chance d'acquérir de temps à autre les esquisses préparatoires réalisées pour des œuvres qui sont déjà en sa possession. L'une des plus remarquables est un dessin à la plume et à l'encre d'Albrecht Dürer (1471-1528), intitulé Nu au bâton (v. 1501-1503), qui est une étude préliminaire pour la figure d'Ève dans la gravure La chute de l'homme (1504). La collection contient aussi une étude finale (découverte en 1984 et acquise au moyen d'une subvention du Gouvernement du Canada) pour le célèbre tableau de Benjamin West (1738-1820), La mort du général Wolfe. Cet illustre sujet historique a inspiré à Louis-Joseph Watteau (1731-1798) un dessin intitulé La mort de Montcalm (v. 1783), qui forme un pendant fascinant à l'œuvre de West.
Outre ces pièces bien connues, la collection contient plusieurs suites d'estampes et d'importants dessins individuels. L'une des œuvres de valeur de l'école italienne est la suite complète des Carceri (Prisons) de Giovanni Battista Piranesi (1720-1778), dans les deux états publiés. En comparant le premier état (v. 1745) au second (v. 1760), on peut voir comment les gravures ont évolué lorsque l'artiste y a ajouté des détails et qu'il a magistralement retravaillé les lumières et les ombres. Une autre œuvre exceptionnelle est l'importante estampe de la Renaissance italienne par Antonio Pollaiuolo (1432-1498), La bataille des hommes nus (v. 1470). Un dessin délicieux de Giovanni Domenico Tiepolo (1727-1804), Rencontre au cours d'une promenade à la campagne (v. 1791), un don de Mme Samuel Bronfman en mémoire de feu son époux, respire l'esprit et le charme du XVIIIe siècle.
La collection espagnole se distingue par ses suites d'estampes de Francisco Goya (1746-1828) : la suite complète des Caprices (1797-1799), Les désastres de la guerre (1810-1820) et La tauromachie (1815-1816). La Suite Vollard (1930-1937), de Pablo Picasso (1881-1973), est un autre joyau; cent estampes déclinent des sujets classiques et mythologiques en agençant les figures de l'artiste, de son modèle et du minotaure sur le motif du corps humain, plus particulièrement du corps féminin – l'un des thèmes favoris de l'artiste. La femme qui pleure, (1937) autre œuvre profondément touchante de Picasso, révèle une facette plus expressionniste de son œuvre gravé.
L'une des estampes les plus importantes de l'école flamande est l'Iconographie (v. 1625-1641) d'Anthony van Dyck (1599-1641), une série de 292 portraits qui représentent des humanistes contemporains ainsi que des célébrités artistiques et politiques, dont une partie a été gravée par l'artiste lui-même. De l'école hollandaise, une trentaine d'œuvres de Rembrandt (1606-1669) nous montrent le grand maître de l'art graphique à son meilleur, particulièrement dans le dessin à la plume et à l'encre intitulé Le baptême de l'eunuque (v. 1652-1655), dans Les trois arbres (1643), une estampe bien connue, et dans le portrait à l'eau-forte de L'orfèvre Jan Lutma (1656).
La collection est particulièrement riche en dessins du XVIIIe et du XIXe siècle et en estampes françaises du XIXe siècle. On y remarque notamment Chênes, Lullingatone Pard (v. 1828), de l'aquarelliste anglais Samuel Palmer (1805-1881) et Les grands baigneurs (1896-v. 1898), une lithographie rehaussée d'aquarelle de Paul Cézanne (1839-1906).
L'école russe moderne a pris une nouvelle importance dans la collection suite à l'acquisition de la suite de lithographies en couleurs Daphnis et Chloé (1957-1961) de Marc Chagall (1887-1985), qui fait partie d'une collection de plus de 550 estampes de Chagall données au Musée par Félix Quinet en mémoire de Joseph et Marguerite Liverant.
Les États-Unis sont représentés principalement par des artistes qui ont été au cœur des grands mouvement de l'art moderne, dont les artistes pop Jim Dine (né en1935), auteur d'un porte-feuille de collages et de sérigraphies intitulé Coffre à outils (1966), et Andy Warhol (1928-1987), auteur des groupes de sérigraphies Flash - 22 novembre 1963 (1968) et Mao Tsé-toung (1972). Le Musée possède également Étude pour « Woman I » (v. 1952), de Willem de Kooning (1904-1988), un dessin d'une importance considérable dans l'histoire de l'expressionnisme abstrait.
L'excellente réputation dont jouit la collection aujourd'hui est largement due à Kathleen Fenwick, sa première conservatrice. Au fil d'une longue carrière au Musée, elle a favorisé l'essor du Département des dessins et estampes et l'a doté, par ses acquisitions judicieuses, d'un noyau d'œuvres de maîtres. Ses successeurs ont su bâtir sur son héritage et le développer. On peut examiner des œuvres particulières de la collection dans le Cabinet d'étude des dessins, estampes et photographies, au Pavillon de la muséologie, en prenant rendez-vous. |