Les champions de l'Ouest ont rencontré, hier soir, les champions du Haut et du Bas-Canada, et la victoire est restée aux étrangers, les Victorias ayant été battus par un score de 2 contre 0.

La lutte a eu lieu en présence d'une foule compacte; jamais le rond des Victorias n'a été aussi littéralement rempli. Tout le monde était anxieux de voir ces athlètes aux prises, et le résultat comme la partie elle-même a pris par surprise tous les sports qui s'y connaissent en fait de hockey.

Les Winnipeg possèdent un team d'une force extraordinaire, mais il n'est pas supérieur aux Victorias qui ont joué, hier soir, la plus belle partie de leur vie.

Les Victorias ont été battus, hier soir, autant par le referee, M. Martin, que par leurs adversaires.

Pourquoi le comité de la coupe Stanley a-t-il persisté à nommer M. Martin, de Toronto, le referee de cette partie, malgré les protestations des Victorias qui se déclaraient prêts à accepter n'importe qui, excepté M. Martin? C'est ce que personne n'a jamais pu comprendre.

Comment M. Martin a-t-il persisté à accepter la charge quand il connaissait les objections ouvertement formulées par les Victorias ? C'est ce que tout le monde croit comprendre maintenant.

Quoiqu'il en soit, les Victorias n'ont pas eu justice, hier soir, de la part du referee, et c'est dû à cela s'ils ont été battus.

C'est durant la première demi heure que tous les points se sont comptés, et les Winnipegs ont passé le puck deux fois dans les goals. Cependant, la première partie a été gagnée par les Victorias, après 8 minutes de jeu, et pour une raison que personne n'a pu comprendre, le referee a refusé de la leur accorder. On a prétendu qu'il y avait eu tricherie.

Inutile de dire que cette décision a complètement démoralisé les Victorias et deux minutes plus tard, cette partie qui appartenait aux Victorias, comptait pour les Winnipegs. Ces derniers avaient profité de l'étonnement dans lequel le referee avait jeté les Victorias, et ils ont attaqué les goals de Jones avec vigueur, et Armitage a gagné la partie.

Nous avons dit que les deux teams le valaient, et nous ne croyons pas qu'il puisse y avoir deux opinions sur ce sujet.

Les Winnipegs possèdent une défense qui n'est certainement pas surpassée en valeur dans tout le pays, et leurs forwards, qui sont des athlètes forts et bien bâtis, sont rapides comme l'éclair. Leur jeu d'ensemble, cependant, n'est pas tout à fait aussi précis que celui des forwards des Victorias, qui ont eu, sur eux, durant la deuxième demi-heure, un avantage marqué.

Par contre, la défense des Victorias a été un peu plus faible que celle des Winnipegs, et tout le monde en a rejeté la faute sur Grant, qui jouait cover point.

nutile de répéter que, comme toujours, il était 9 heures quand les joueurs ont fait leur apparition sur la glace, et que les spectateurs avaient eu le temps de souffrir tout à leur aise du froid qu'il faisait hier. Mais, enfin, il faut bien se soumettre puisque tout indique que les Victorias en ont fait une clause de leurs règlements de faire attendre et de faire geler les gens.

Lorsque le premier signal a enfin été donné, les joueurs des deux teams se sont avancés et se sont placés dans l'ordre suivant :

1re partie. A peine le signal du départ était-il donné que les Victoria sont pris l'attaque. Wallace et McLea ont joué une combinaison tellement rapide et avec tant de précision, que les Winnipegs n'ont pas pu toucher au puck. Flett et Merritt ont cependant réussi à repousser l'attaque et la lutte s'est engagée au centre du rond. Armitage, Bain et Howard ont fait preuve d'une grande habileté. Ce sont de magnifiques patineurs et leur jeu est très rapide. Ils ont réussi à pousser le puck jusqu'aux goals de Jones, mais il est vite revenu vers le centre. La lutte était grande, et la foule était dans le plus grand enthousiasme. Les applaudisements n'étaient pas ménagés aux Victorias, dont les forwards, qui sont des jeunes gens frêles et légers, jouaient avec un sang-froid et un esprit d'à-propos admirables. Chacun de leurs mouvements était bien mesuré et ils se passaient le puck avec une rapidité et une précision qui déjouaient leurs adversaires.

Après une lutte de quelques minutes entre les forwards des deux teams McDougall a réussi à arrêter le puck au moment où Howard se disposait à le pousser vers Jones, et, passant à travers Bain, Campbell et Higginbotham, il a amené le puck jusqu'à vingt pieds des goals. Il a alors attendu Flett et, au moment où ce dernier arrivait pour lui enlever le puck, il l'a déjoué et l'a passé à Davidson qui, prompt comme l'éclair, l'a lancé dans les goals, et l'umpire a levé la main. Tous les spectateurs ont alors bondi sur leurs pieds, et pendant deux longues minutes les applaudissements les plus frénétiques se faisaient entendre.

Quelle ne fut pas la surprise générale quand la foule a constaté que le referee avait refusé d'accorder cette partie aux Victorias et qu'il avait ordonné de remettre le puck à l'endroit où il était quand McDougall l'a passé à Davidson? Tout le monde était dans l'étonnement le plus complet, et les joueurs, semblaient découragés. Deux minutes plus tard, les Winnipegs avaient gagné cette première partie et, cette fois, elle devait compter.

2e partie -- Durant cette partie, qui a duré 9 minutes, les Winnipeg ont eu un avantage marqué sur leurs adversaires, qui ne jouaient plus comme ils avaient l'habitude de le faire.

McDougall, McLea, Davidson et Wallace, semblaient [illisible] leur courage parfois, mais leur combinaison n'était plus aussi effective et les joueurs de leur défense semblaient un peu nerveux.

Tout le monde constatait que la présence du referee les gênait. D'un autre côté, les Winnipegs redoublaient d'ardeur, et leur jeu était admirable. Il est impossible de voir des athlètes plus rapides. Il fallait un œil exercé et expert pour bien suivre leurs mouvements quand ils avaient le puck. Si Armitage, Campbell, Bain et Howard pouvaient jouer une combinaison comme les forwards des Victorias, il n'y a pas un team au monde qui pourrait les battre. Finalement, après 9 minutes de jeu, Grant, le cover point des Victorias, ayant été trop lent à repousser le puck, alors qu'il pouvait facilement le faire, Howard et Bain ont eu le temps de le lui enlever et d'attaquer les goals. Jones et Henderson ayant repoussé la première attaque, Campbell a fait rebondir le puck, qui a passé dans les goals.

Le score était alors 2 contre 0 en faveur des Winnipegs, et il était encore le même lorsque le dernier signal a été donné.

3e partie -- Le capitaine des Victorias a alors décidé de ranimer le courage de ses hommes, et les spectateurs se sont aperçus qu'il y avait un changement dans leur façon d'attaquer les goals de leurs adversaires.

McDougall, Wallace et McLea déjouaient facilement leurs adversaires, et les goals de Merritt étaient constamment en danger. Deux fois de suite, McLea a lancé le puck dans les goals, et il se préparait à revenir à l'attaque avec plus d'ardeur que jamais quand le referee a arrêté la partie, et lui a ordonné de se retirer, sous prétexte qu'il avait manqué aux règlements.

Le referee avait été le seul à voir cette tricherie. En reprenant le jeu, Flett, pour empêcher McDougall de tirer dans les goals, s'est jeté sur lui et a failli le faire culbuter.

Tous les spectateurs ont protesté vivement, mais le referee n'avait rien vu, et la partie s'est continuée comme si rien d'extraordinaire n'était arrivé.

Quand le signal du repos a été donné, les Victorias luttaient comme des désespérés, et ils semblaient décidés de vaincre.

En recommençant le jeu, après le repos, les Victorias y allaient avec tant d'ardeur que tout le monde s'attendait à les voir remporter la victoire. C'est durant cette demi-heure que les forwards des Victorias ont montré leur supériorité sur ceux de leurs adversaires, mais c'est alors aussi que Merritt s'est acquis la réputation d'être le meilleur gardeur de goals qui ne se soit jamais vu.

Les Victorias ont été à l'attaque plus que les trois quarts du temps, et le puck frappait dans les goals avec une régularité désespérante pour les forwards des Winnipegs, mais Merritt repoussait chaque attaque avec un sang froid extraordinaire.

Durant tout la deuxième demi-heure, les Winnipegs n'ont pu aller à l'attaque que trois fois, bien comptées, et Jones et Henderson n'ont jamais eu de difficultés à repousser le puck vers le centre, où Wallace et McLea l'attendaient toujours et Merritt recommençait à lutter.

Quand le dernier signal a été donné, les Victorias étaient encore à l'attaque, mais ils n'étaient pas plus avancés qu'au commencement, et le referee a proclamé les Winnipegs vainqueurs par 2 contre 0.

Le trophée Stanley va donc prendre la route de l'Ouest. En reviendra-t-il jamais? C'est ce qui est douteux.