Les édifices de Queens Park ont été
construits au début des années 1890 afin de loger
lAssemblée législative de lOntario. Le
décor dorigine de lintérieur de la Chambre,
basé sur celui de la Chambre des communes britannique, était
une combinaison somptueuse déléments décoratifs,
dont des peintures de lartiste torontois Gustav Hahn sur les
parois supérieures et le plafond. Malheureusement, la richesse
du décor dorigine a été perdue au fil
des années par de nouvelles décorations et peintures
disparates.
Paul Tranquada, directeur du Service de lentretien et de
la conservation à lAssemblée égislative
de lOntario, a demandé à lICC de participer
au cours du mois de juillet et daoût 1999 à la
planification du rétablissement de lintérieur
de la Chambre. Le projet de rétablissement, géré
par Martin Davidson de la société A.J. Diamond, Donald
Schmitt and Company, une firme darchitectes de Toronto, et
John Edelman de lAssemblée législative, comprenait
une remise à neuf complète afin de redonner à
la Chambre lagencement des couleurs dorigine, datant
de la fin du XIXe siècle. La participation
de lICC à ce projet remonte à une étude
antérieure de létat du plafond de la Chambre
en 19791,2. Pour létude de 1999, lICC
a été chargé dentreprendre deux projets
principaux :
- étudier les couleurs afin détablir les caractéristiques
des peintures originales et de pouvoir repeindre les éléments
architecturaux;
- mettre à lessai des méthodes pour enlever
des couches de surpeint des peintures murales originales de 1893,
exécutées en style art nouveau/académique
par Gustav Hahn sur les parois supérieures de la Chambre.
La question était de savoir sil était possible
de rétablir en toute sécurité les peintures
murales originales, et dans laffirmative, à quel coût?
La solution de rechange à la restauration des peintures murales
originales aurait été de rétablir lagencement
de 1893 à laide de documents photographiques fragmentaires
en noir et blanc. Les recommandations de lICC ont été
incluses dans deux rapports3,4.
La figure de la Sagesse dans le tympan ouest du mur nord
a été désignée pour létude
de lenlèvement du surpeint5. Durant une
étude précédente faite en 1993-1994 par Martin
Weaver and Associates (pour A.J. Diamond, Donald Schmitt and Company),
la firme avait fait des essais denlèvement du surpeint
sur le tympan adjacent pour révéler partiellement
la figure allégorique du Pouvoir6. Létude
de 1999 menée par léquipe du projet a trouvé
au moins 6 couches de surpeint, dues aux changements dans lagencement
décoratif de la Chambre commencés après le
désastreux incendie qui a détruit laile ouest
de lédifice en 1909. Les nouvelles couches de peintures
sont documentées en 1912, 1952, 1974 et à la fin des
années 1980. On a pu identifier les liants de la plupart
de ces couches.
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En tant que chargé de projet, jai engagé plusieurs
restaurateurs du secteur privé, y compris Susan Maltby (Toronto)
et Mary Hough (Ottawa) pour léquipe des finis de couleurs,
et Amanda Gray (Kingston) et Jennifer Cheney (Toronto) pour léquipe
des essais sur les peintures murales. Ces équipes ont travaillé
avec les restauratrices et scientifiques de lICC Helen McKay,
Holly Fiedler (stagiaires de lUniversité Queens),
Nancy Binnie et Kate Helwig. Michael Harrington, Paul Heinrichs,
Bob Arnold et Peter Vogel ont également apporté leur
aide brièvement. Durant lun des étés
les plus chauds enregistrés à Toronto, les équipes
ont dû endurer des températures de 35 °C à
une hauteur de 20 mètres sur les échafaudages. Les
membres des équipes ont dû shabituer au bruit,
à la saleté, à la poussière, à
linconfort et aux interruptions constantes de visites de relations
publiques, visites qui faisaient partie de ce projet à haute
visibilité. Les équipes ont aussi donné environ
sept interviews tant en anglais quen français à
la télévision et aux journaux afin de répondre
aux demandes dinformation du public au sujet de ce projet
de rétablissement. Tous ont droit à des félicitations
pour leur persévérance et leur humour face à
des conditions de travail aussi difficiles.
Les finis de couleurs
Léquipe des finis a fait lexamen du site. La
superposition des couches de couleurs a été déterminée
en examinant des coupes transversales au microscope à lumière
réfléchie et au microscope électronique à
balayage et les liants ont été identifiés par
spectrographie infrarouge à transformée de Fourier7
. Les couleurs ont été vérifiées par
lenlèvement mécanique des couches de surpeint
à laide de scalpels et dune sableuse Fein à
petite tête et dépoussiéreur. Lorsque les couches
de couleurs originales ont été exposées, trois
restaurateurs ont procédé à lassortissement
visuel des couleurs aux coordonnées de couleurs L*a*b* de
la CIE sous différentes sources de lumières, vérifié
par Nancy Binnie, scientifique en conservation de lICC, à
laide dun colorimètre Minolta CR-200. Le premier
appariement a été fait avec la Benjamin Moore HC-34
« Wilmington Tan », un ocre jaune froid de la série
de couleurs du patrimoine. Un glacis de couleur terre cuite a été
trouvé sur larrière-plan des frises en bas-relief
des grands arcs des fenêtres et des galeries des visiteurs,
quon a pu apparier à la Benjamin Moore #1204. Le lustre
et lapparence finale ont été vérifiés
à laide de plusieurs photographies en noir et blanc
de la fin du XIXe siècle montrant le coin nord-est
de lintérieur. Les peintures appariées ont été
comparées aux fragments intacts de peinture originale se
trouvant derrière les moulures.
La peinture choisie pour repeindre la Chambre était une
émulsion acrylique. On a demandé à lentrepreneur
en peinture, Tonino Margani de New Millennium (Toronto), de préparer
une section prototype afin de déterminer le lustre des couleurs
et la saturation du glacis de couleur terre cuite. Le choix définitif
convenu par tous les intervenants du projet a été
un fini satiné pour les arcs principaux et coquille duf
pour les reliefs.
Lagencement des couleurs dans la Chambre depuis les années
1970 était une combinaison maladroite de blanc et de bleu
avec des accents de peinture bronze sur les reliefs des frises.
À mesure que la nouvelle peinture progressait, il apparaissait
clairement que lagencement plus discret docres et de
terre cuite rapprochait lapparence intérieure de la
couleur de la pierre sur lextérieur de lédifice.
Tous les textiles rouges et bleus ont été remplacés
par des tapis, des draperies et du capitonnage verts, redonnant
à la Chambre son apparence dorigine.
Létude des peintures murales
La deuxième étape de létude a porté
sur les peintures murales de Gustav Hahn afin dévaluer
la possibilité denlever le surpeint de la peinture
originale dans le tympan ouest du mur nord de la Chambre. Cette
peinture murale est celle de la Sagesse, identifiée
par Bayer et Vogel daprès les dossiers des appels doffres
dorigine.
« Les descriptions dans les appels doffres datant
de 1892 portent sur des sujets allégoriques sur les deux
murs : la Modération sur le mur sud au-dessus de
la chaire du président, la figure principale tenant une
bride avec gourmette, et le chérubin de soutien tenant
un codex. Sur le mur nord, au-dessus des pupitres des membres,
apparaissent les sujets du Pouvoir, une figure virile tenant
une épée et une branche de chêne, et la
Sagesse, avec un livre ouvert et les lampes de la connaissance.
» [trad.]8
Les résultats de cette étude indiquent quil
vaut mieux ne pas utiliser de méthodes mécaniques
denlèvement du surpeint, à cause des risques
dendommager la peinture originale. On a essayé sans
succès le sablage et le clivage au scalpel, ainsi que des
méthodes de pelage à sec des couches. Les méthodes
chimiques, bien que très lentes, ont pu être utilisées
avec un contrôle adéquat sur certaines parties des
peintures murales, par exemple sur les couleurs comme les carnations
mélangées avec du blanc de plomb. Lutilisation
des méthodes chimiques a été difficile dans
les zones où la peinture originale manquait de liant et était
sensible aux solvants organiques nécessaires pour gonfler
et enlever le surpeint coriace à base dhuile. Cependant,
nous étions davis que lenlèvement du surpeint
à laide de solvants organiques était la méthode
la plus sûre et la mieux contrôlée dont nous
disposions. Nous avons appliqué des panneaux couverts de
Gore-Tex pulvérisés dacétone sur les
murs pour faire gonfler la peinture et lenlever par couches.
Tout le mur nord a ensuite été découvert jusquau
plan décoratif de 1912, afin den arriver à une
estimation fiable du temps nécessaire aux entrepreneurs du
secteur privé qui termineront la restauration du reste de
la Chambre pendant les périodes futures des vacances parlementaires.
Conclusion
Un examen des problèmes de conservation et des estimés
préliminaires de coûts ont été présentés,
fondés sur le projet de six semaines. LICC a été
en mesure de démontrer que la conservation des peintures
murales originales était une solution de rechange économique
au renouvellement complet de lensemble des peintures murales.
Comme il sera probablement impossible denlever tout le surpeint,
la restauration combinera le retouchage et la reconstruction des
zones endommagées de la peinture murale, ainsi quune
nouvelle peinture des zones de surpeint qui ne peuvent être
enlevées, par exemple des parties des bordures au pochoir
de 1912.
Ces résultats aideront à planifier les travaux de
conservation à venir, qui seront donnés à contrat
à des restaurateurs du secteur privé. LICC demeurera
disponible pour aider les entrepreneurs à exécuter
ce travail.
Références
- Vogel, P., Bayer, F. «Conservation Problems Within the
Legislative Building in Toronto», Conservation within
Historic Buildings, Preprints of the contributions to the
Vienna Congress, 7 au 13 septembre 1980, sous la direction de
N.S. Brommelle, G. Thomson et P. Smith, Londres, Institut international
pour la conservation, 1980, p. 64-68.
- Bayer, F. Vogel, P. «Conservation Problems within the
Ontario Legislative Building», Canadian Regional Review
II, III, Ottawa, Regional Council of the Commonwealth Parliamentary
Association, juin 1980, p. 16-21.
- Bourdeau, J., Binnie, N., Helwig, K. Colour Finishes Study
and Recommendations for the Ontario Legislature, Ottawa, Direction
des services scientifiques et de conservation, Institut canadien
de conservation, 1999.
- Bourdeau, J., Gray, A. Recommendations for the Conservation
of Mural Paintings in the Ontario Legislature, Ottawa, Direction
des services scientifiques et de conservation, Institut canadien
de conservation, 1999.
- Op. cit., p. 67.
- «Chamber Investigation» Section 6, Ontario Legislative
Assembly Buildings and Grounds Design Development Report,
Toronto, A.J. Diamond, Donald Schmitt and Company, 1994.
- Helwig, K. Analysis of Paint Samples from the Ontario Legislature.
Rapport 3883 du Laboratoire de recherche analytique, Ottawa, Direction
des services scientifiques et de conservation, Institut canadien
de conservation, 1999.
- Tiré de Vogel, P., Bayer, F. « Conservation Problems
Within the Legislative Building in Toronto.» Conservation
within Historic Buildings, Preprints of the contributions to the
Vienna Congress, 7-13 septembre 1980 , sous la direction de
N.S. Brommelle, G. Thomson et P. Smith, Londres, Institut international
pour la conservation, 1980, p. 66
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