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L'héritage d'Eleanora : Penchons-nous sur le journal intime d'une jeune fille au XIXe siècle

par Caroline Parry, écrivaine, interprète et enseignante

Introduction
À propos de la famille Hallen
Écrire son propre journal
À propos du fonds de la famille Hallen


Introduction

Nous vivons à l'ère du cellulaire, du clavardage, des blogues, et de la messagerie instantanée. Pour lire les textes de ce site Web, toi -- et ton ordinateur -- avez réalisé quelques opérations extrêmement rapides. Dans un monde de grande vitesse, le bon vieux journal personnel écrit à la plume peut paraître lent et ennuyeux, mais c'est ainsi que d'innombrables personnes, telles qu'une jeune fille du nom d'Eleanora Hallen, ont laissé la trace de leurs pensées et de leurs vies. Maintenant, grâce aux technologies du XXIe siècle, tu peux consulter en ligne les pages du journal intime d'une jeune fille du XIXe siècle.

Tu peux non seulement déchiffrer l'écriture d'Eleanora, mais aussi comprendre l'échange de lettres entre les membres de sa famille. Tu peux examiner les carnets de croquis et les peintures d'Eleanora, et comparer ses bandes dessinées aux tiennes. Tu découvriras les rimettes amusantes ou les poèmes humoristiques sur les membres de la famille Hallen et sur « qui aime qui ». Ces notes te rappellent-elles les petits mots que tu envoies à tes amis pour les taquiner?

Page du journal d'Eleanora illustrée de croquis représentant 10 membres de la famille Hallen, 1836   Page du journal d'Eleanora illustrée de dessins et de griffonnages représentant des personnages et des animaux, 1836   Page du journal d'Eleanora illustrée de dessins et de griffonnages représentant des personnages et des navires, 1835
Page du journal d'Eleanora illustrée de croquis des membres de la famille Hallen, 1836 (volume 7, dossier 5)
Source
  Page du journal d'Eleanora illustrée de dessins et de griffonnages, 1836 (volume 7, dossier 6)
Source
  Page du journal d'Eleanora illustrée de dessins et de griffonnages, 1835 (volume 7, dossier 3)
Source

Tu découvriras également des écrits et œuvres d'art de tous les membres de cette famille -- qui comptait 11 enfants! Combien connais-tu aujourd'hui de familles de 10 frères et sœurs? Tous ces documents proviennent de la famille Hallen qui a immigré au Canada en 1835, au cours de la principale vague d'émigration britannique. Heureusement, les descendants de la famille Hallen ont conservé les journaux et les carnets de dessins d'Eleanora, ainsi que ceux de ses parents, et de ses frères et sœurs.

Page du journal de George Hallen, 1835   Page de dessins et de griffonnages de personnages tirée du journal de Mary Hallen, 1834
Page du journal de George Hallen, le père d'Eleanora, 1835 (volume 2, dossier 3)
Source
  Page de dessins et de griffonnages tirée du journal de Mary Hallen, la soeur d'Eleanora, 1834 (volume 5, dossier 2)
Source

À propos de la famille Hallen

S'établir au Canada

Eleanora Hallen et les membres de sa famille quittent Rushock, minuscule village au centre de l'Angleterre, dans le Worcestershire, en avril 1835. Durant l'été et l'automne qui suivent, ils voyagent de New York vers le Haut-Canada (aujourd'hui l'Ontario), où ils commencent une nouvelle vie. Dans son journal, qui contient des descriptions très colorées des tribulations de la famille Hallen, Eleanora témoigne parfois de sa fatigue ou de son ennui.

Page du journal d'Eleanora dans laquelle elle décrit ses activités quotidiennes à bord d'un navire durant la traversée transatlantique, 1835   Page du journal d'Eleanora dans lesquelles elle décrit ses activités quotidiennes à bord d'un navire durant la traversée transatlantique, 1835
Pages qui se suivent du journal d'Eleanora dans lesquelles elle décrit ses activités quotidiennes à bord d'un navire durant la traversée transatlantique, 1835 (volume 7, dossier 3)
Source

  Page du journal d'Eleanora dans laquelle elle décrit ses activités quotidiennes à bord d'un navire durant la traversée transatlantique, 1835
  Page du journal d'Eleanora dans laquelle elle décrit ses activités quotidiennes à bord d'un navire durant la traversée transatlantique, 1835 (volume 7, dossier 4)
Source

Après sept semaines de voyage en mer, de Liverpool à la ville de New York, les Hallen séjournent à Sandy Hill, sur les berges de la rivière Hudson. Le révérend Hallen poursuit seul le voyage vers l'ouest par le canal Érié. Il rencontre un certain capitaine John Steele, qui vend aux Hallen leur nouvelle maison : une cabane en rondins dans le canton de Medonte, au nord de Toronto, à l'ouest du lac Simcoe, près du village de Coldwater. (Le capitaine Steele a peut-être pris cet arrangement pour que Hallen l'aide à construire une église sur sa terre). Le révérend Hallen, moins accaparé que sa femme par le soin des enfants, jouit de plus de temps pour écrire son journal, et ses commentaires apportent souvent un éclairage différent de ceux de sa fille. C'est une réalité que rencontrent souvent les chercheurs : comment décider lequel des points de vue est le plus « vrai ».

À la fin octobre, lorsque Hallen revient de son expédition et que d'autres montants d'argent arrivent d'Angleterre, la famille se remet en route. Cette fois, elle prend le train jusqu'à Oswego, dans l'État de New York. Eleanora mentionne à peine ce nouveau mode de transport, mais c'est le début de la grande époque des machines à vapeur, quand les trains de passagers sont encore une nouveauté. Les Hallen traversent ensuite le lac Ontario en bateau à vapeur. À partir de Toronto, ils se déplacent en diligence, en bateau à vapeur, en char à bœufs et à pied, et parviennent enfin à destination début novembre. Au cours de cette première année, difficile mais excitante, Eleanora se confie souvent à son journal. Plus tard, elle écrit moins souvent, sans doute en raison de responsabilités plus nombreuses.

La vie à Penetanguishene, en Ontario

En 1840, Sarah, l'aînée des enfants, épouse John Drinkwater, un immigrant anglais, et s'établit dans les environs d'Orillia, situé au nord de Toronto. Eleanora -- peut-être un peu envieuse -- se moque de leur histoire d'amour. Bientôt, la majeure partie de la famille se déplace vers Penetanguishene, où le révérend Hallen trouve un travail mieux rémunéré comme aumônier militaire. Son fils George continue de cultiver leur terre, qu'ils ont appelée « Rushock », du nom de leur village natal en Angleterre.

Copie d'un poème d'Eleanora de 1833, dans le journal de Mary, 1834  
Copie d'un poème d'Eleanora de 1833, dans le journal de Mary, 1834 (volume 5, dossier 1)
Source
 

À « Penetang », petit établissement de traite de fourrure au bord du lac Huron, la vie des Hallen ressemble davantage à celle qu'ils menaient en Angleterre. Ils sont logés dans une maison plus confortable et les activités sociales ne manquent pas. Eleanora et ses frères et sœurs (en particulier Mary, douée de plus grands talents artistiques) passent des heures à dessiner et à peindre, nous laissant de nombreuses vues de cette période.

Les enfants Hallen reçoivent leur éducation scolaire à la maison. Leur gouvernante et leurs parents leur font la classe jusqu'à ce qu'ils émigrent au Canada; par la suite, ce sont les aînés de la famille qui enseignent aux plus jeunes. Ces cours semblent moins formels -- ou moins fréquents -- qu'en Angleterre. Cependant, ils apprennent tous beaucoup à « l'école de la vie »!

Eleanora débute l'écriture de ses journaux

Les enfants Hallen tiennent probablement un journal comme exercice de rédaction. Eleanora elle-même commence le sien le 1er avril 1833. Elle écrit énormément, notant ses activités quotidiennes des deux côtés de l'océan -- et même en plein milieu. Elle fait beaucoup de taches d'encre et de ratures lorsqu'elle tente de traduire ses pensées. Toi aussi tu peux, tout comme elle, essayer de t'exprimer. T'inquiètes-tu des mots mal orthographiés? Regarde les pages où Eleanora pratique son orthographe.

Page du journal d'Eleanora dans laquelle elle pratique sa rédaction, 1835   Page du journal d'Eleanora dans lesquelle elle pratique sa rédaction, 1834
Pages qui se suivent du journal d'Eleanora dans lesquelle elle pratique sa rédaction, 1834 (volume 7, dossier 1)
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Les textes d'Eleanora révèlent un ton habituellement joyeux et souvent impertinent. Ses journaux ressemblent plus à un rapport d'activités quotidiennes qu'à un reflet de pensées profondes. Les historiens trouveront donc peu de témoignages d'événements extérieurs dans les écrits d'Eleanora -- c'est à peine si elle mentionne les nouvelles qui font l'actualité. Ainsi, elle ne consacre que cinq phrases à la rébellion menée par Mackenzie en 1837, qu'elle note juste après avoir parlé des dernières nouveautés à la mode. Cependant, les faits rapportés sont amplifiés lorsqu'on lit que les Hallen « sont très heureux de voir les gens revenir à la maison » [traduction libre].

Le destin frappe -- En souvenir d'Eleanora

  Page du journal d'Eleanora, 1846
  Dernière page du dernier journal d'Eleanora, conservé à Bibliothèque et Archives Canada, 1846 (volume 7, dossier 9)
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Après 10 ans au Canada, les parents Hallen retournent en Angleterre rendre visite à leur famille. Ils envoient tous les jours à la maison un journal écrit sous forme de lettre. Durant leur absence, Eleanora, alors âgée de 23 ans, tombe malade et meurt. Elle a souvent souffert de problèmes de santé, mais c'est la « consomption » (tuberculose) qui l'emporte dans les années 1840. Sarah Hallen raconte cette triste histoire dans son journal. Parce que Eleanora meurt si jeune, la famille conserve mieux son journal que ceux des autres membres, en souvenir d'elle.


Écrire son propre journal

Bien sûr, nos pensées -- sinon nos doigts -- ont toujours voyagé plus ou moins à la vitesse de la communication électronique. Aujourd'hui, nous pouvons partager ces pensées plus rapidement et à une plus grande distance, mais peu importe la vitesse à laquelle les humains communiquent, nous devons toujours prendre le temps de comprendre. Quand Eleanora essaie d'expliquer les « faits » entourant la mort de la petite Grace âgée de trois ans, elle pleure intérieurement, tentant de traduire ses sentiments en mots et ensuite les rature. Cet extrait du journal nous aide à comprendre -- même après presque 200 ans -- la tristesse qu'éprouve cette famille à la perte de la petite sœur.

Même avec des outils de hautes technologiques, nous devons encore intégrer ce que nous découvrons à ce que nous connaissons déjà. Un journal intime est un excellent moyen d'y arriver. Aujourd'hui, tu peux écrire sur un écran d'ordinateur plutôt que sur du papier. Tu peux partager tes réactions à la vie par courriel, ou dans un groupe de discussion avec tes amis internautes. Tu peux aussi livrer tes pensées publiquement, dans un « blogue ». Quel que soit le moyen choisi, comme Eleanora, tu réfléchis à toi-même et à ta vie, et tu notes tes réflexions -- tu crées peut-être l'histoire! Eleanora nous raconte à quel point elle déteste son cousin (« Le Grand Bela ! »), comment elle s'ennuie ou elle est jalouse. Son père écrit trois longues pages lorsque une autre de ses filles, Edith, meurt avant que la famille ne quitte l'Angleterre. Les Hallen ne mesurent peut-être pas à quel point écrire les aide à trouver un certain équilibre intérieur -- et toi? Penses-tu que les gens expriment plus franchement leurs émotions aujourd'hui qu'à l'époque d'Eleanora?

Page du journal de George Hallen, le père d'Eleanora, dans lesquelle il décrit le décès de sa fille Edith, 1835 (volume 2, dossier 3)   Page du journal de George Hallen dans lesquelle il décrit le décès de sa fille Edith, 1835
Pages qui se suivent du journal de George Hallen, le père d'Eleanora, dans lesquelle il décrit le décès de sa fille Edith, 1835 (volume 2, dossier 3)
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À propos du fonds de la famille Hallen

Bibliothèque et Archives Canada (BAC) a pu acquérir les archives de la famille Hallen en 2003. Depuis, le personnel de BAC travaille à cataloguer et préserver ces précieux documents. Les archives de la famille Hallen constituent un ensemble d'une ampleur et d'une originalité remarquables, que l'on appelle un « fonds ». Ce mot désigne un ensemble formé de nombreux documents interreliés, parfois conservés dans plus d'un établissement.

Le personnel de BAC a photographié la plupart des aquarelles du fonds Hallen et numérisé des pages choisies du journal d'Eleanora, de sa sœur Mary, et de leur père, le révérend George Hallen. Une fois les travaux de conservation terminés, les journaux -- et d'autres documents du fonds de la famille Hallen -- seront microfilmés.

Ces mesures serviront à protéger les documents et à les rendre plus accessibles aux chercheurs. Malheureusement, les premiers journaux d'Eleanora ont disparu. Pour en connaître le contenu, les chercheurs doivent se contenter d'une transcription faite en 1950. Toutefois, BAC conserve tous les autres originaux, de mai 1834 à 1846.

Rares sont les documents historiques qui témoignent du point de vue des enfants. Eleanora, d'abord petite fille, puis adolescente et enfin jeune femme, raconte dans son journal sa vie quotidienne -- voilà presque 200 ans! Lire ses mots, c'est s'offrir un voyage dans le temps. À mesure que tu exploreras le fonds de la famille Hallen, tu apprendras à mieux connaître la vie des immigrants à l'époque des pionniers, en particulier celle des enfants. Tu découvriras d'autres problèmes à résoudre et d'autres questions auxquelles répondre. C'est cela la recherche. Continue à cliquer et à explorer!