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Laurier et l'Ouest

par Peter Russell [page 1 de 2]
Sir Wilfrid Laurier, 1906 (C-016741)
Sir Wilfrid Laurier, 1906 (C-016741)

Aucun autre premier ministre n'a eu autant d'influence sur l'Ouest canadien que sir Wilfrid Laurier qui, à son tour, a été très marqué par cette région. Non seulement a-t-il joué un rôle de premier plan en ce qui a trait aux affaires politiques courantes dans l'Ouest, mais il a aussi façonné le paysage politique et économique des Prairies.

Laurier a suscité l'intérêt du public lorsque, contrairement à son habitude, il a prononcé un discours passionné au sujet de la pendaison de Louis Riel. « Si j'étais né sur les rives de la rivière Saskatchewan, déclara-t-il, j'aurais moi aussi pris les armes pour lutter contre la négligence du gouvernement et la cupidité effrontée des spéculateurs. » Cette déclamation ne lui a pas nui puisque, deux ans après, il était chef du Parti libéral.

L'Ontario n'avait pas aimé la position qu'il avait prise au cours du débat sur Riel, mais dans l'Ouest, c'était le contraire. Au cours des préparatifs en vue des élections de 1896, T.C. Davis, un pilier du Parti libéral à Prince Albert, cherchait à profiter de la division dans les rangs du parti au pouvoir. Choisi comme candidat conservateur, James MacKay, un avocat respecté, faisait face à l'hostilité d'une faction qui refusait d'accepter un « Métis ». Cette dernière avait donc présenté son propre candidat. C'est alors que Davis a eu l'idée de demander à Laurier de se présenter comme candidat libéral dans la circonscription de Prince Albert. Selon lui, le Parti libéral se taillerait ainsi une meilleure place dans une région où il n'avait pas obtenu beaucoup de votes par le passé et profiterait du discours en faveur des Métis prononcé par Laurier en 1885. (À cette époque, un candidat pouvait se présenter dans plus d'une circonscription fédérale.) Ainsi, Laurier a été dûment élu dans deux circonscriptions, soit dans son comté de Québec-Sud et dans Prince Albert.

À titre de chef du Parti libéral, Laurier s'était rangé du côté des droits de la province dans le débat sur la question des écoles du Manitoba (1890-1897). La période où il a été premier ministre a coïncidé avec l'arrivée massive d'immigrants dans l'Ouest canadien.

On a dit que, en confiant le poste de ministre de l'Intérieur à un résidant de l'Ouest, Clifford Sifton, un homme dynamique et compétent, Laurier avait choisi exactement l'homme qu'il fallait. On a aussi prétendu que Sifton, tout comme Laurier, avait simplement profité du fait qu'il n'y avait plus de terres disponibles aux États-Unis. Quoi qu'il en soit, il est évident que la colonisation « des meilleures terres nouvelles » au Canada était inévitable, peu importe le parti au pouvoir.

Toutefois, la décision de construire pas un, mais deux chemins de fer transcontinentaux, a été très controversée. Deux groupes rivaux  --  le Grand Tronc, dans le centre du Canada, et le Canadian Northern, au Manitoba  --  voulaient persuader le gouvernement canadien de subventionner leurs projets respectifs. Étant donné que ni l'un ni l'autre ne voulait s'embarquer dans une entreprise d'une telle envergure sans l'aide du fédéral, le ministre des Chemins de fer et Canaux dans le gouvernement Laurier, A.G. Blair, favorisait un compromis pour que les deux groupes unissent leurs forces, chacun fournissant ce qui manquait à l'autre. Laurier n'a pas tenu compte de son avis, l'obligeant ainsi à démissionner. Enthousiasmé par l'expansion que connaissait le pays et proclamant que le XXe siècle serait « le siècle du Canada », Laurier a plutôt accepté de financer deux nouveaux chemins de fer transcontinentaux. En 1916, la construction étant presque terminée, les compagnies ferroviaires étaient près de la faillite, et Laurier a dû reconnaître que son enthousiasme excessif avait été présomptueux.

Nouvellement élu premier ministre, Laurier s'est efforcé d'étancher la soif d'indépendance de l'Ouest; c'est pourquoi, en 1897, il a accordé le statut de gouvernement responsable à l'assemblée territoriale. Cependant, il allait bientôt regretter sa décision car, en 1901, le gouvernement territorial a adopté un nouveau décret qui rendait difficile l'ouverture d'écoles catholiques romaines.

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