 | No. 13 |
Les Sifton
par Neil Forsyth |
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Clifford Sifton (1861-1929), son épouse et leurs cinq fils 1910 (PA-012349) |
La famille Sifton joua un rôle très varié dans I'histoire du Canada. Férue de politique, elle a donné trois politiciens, dont un grand personnage. Les Sifton se sont également occupés pendant longtemps d'entreprises de presse, de divers commerces et de radiodiffusion. La présente génération, la quatrième, s'est retirée complètement de la politique, et en grande partie du journalisme. |
Les Sifton ont toujours été des Libéraux. John Wright Sifton (1833-1912) était un fermier et un petit entrepreneur du canton de London (Ontario). Lorsque Alexander Mackenzie fut élu en 1874, les relations de Sifton dans le Parti libéral lui permirent d'obtenir une série de contrats du Canadien Pacifique au Manitoba. Après la défaite des Libéraux en 1878, ses contrats furent soumis à une surveillance rigoureuse qui lui fit beaucoup de tort. Il alla s'installer à Brandon en 1881 pour profiter de la fièvre de spéculation foncière, mais fut plutôt entraîné dans la faillite qui suivit. Élu deux fois à I'assemblée législative du Manitoba, il fit office de Président de la Chambre au cours de la session 1878-1879; il essuya toutefois quatre défaites électorales et finit par abandonner la politique pour aller habiter en Californie. À son retour au Manitoba, il réussit à obtenir une sinécure grâce à ses accointances politiques et passa le reste de sa carrière à occuper des fonctions peu exigeantes, attribuées par faveur.
John Wright Sifton eut deux fils. L'aîné, Arthur (1859-1921), ouvrit un cabinet à Brandon en 1881 avec son frère Clifford, avant d'aller s'installer dans I'Ouest en 1885. Jouant dès le début un rôle actif dans les affaires publiques des Territoires du Nord-Ouest et jouissant de I'aide d'amis haut placés, il eut une carrière couronnée d'un immense succès. En 1907, il était juge en chef de la nouvelle province de I'Alberta. Puis il se lança en politique et devint presque immédiatement premier ministre de la province; de 1910 à 1917, il fut à la tête du gouvernement et de trois ou quatre ministères importants. Enfin, il se lança dans la politique fédérale en 1917 en devenant membre du gouvernement d'union, détenant successivement quatre portefeuilles avant la dissolution du gouvernement en 1920. Il finit ses jours en occupant le poste de premier président de la Commission de I'air. |

John Wright Sifton (1833-1912), père d'Arthur Lewis Sifton et de sir Clifford Sifton (PA-127249) |
Si brillante que fût la carrière d'Arthur Sifton, elle fut éclipsée par celle de son frère Clifford (1861-1929). Ministre peut-être le plus connu durant les cinquante premières années de la Confédération, il a récemment fait I'objet d'une biographie de D.J. Hall. Sifton fut procureur général du Manitoba de 1891 à 1896; chargé de I'éducation, il entama les négociations qui menèrent au compromis Laurier-Greenway en 1896. Invité à entrer au cabinet fédéral par Laurier, il fut ministre de l'Intérieur et surintendant général des Affaires indiennes de 1896 à 1905. Au premier ministère, il fut associé à la politique d'immigration du gouvernement qui permit de peupler une bonne partie de l'Ouest canadien. Aux Affaires indiennes, il prêta le flanc à la critique et y répondit par le Manitoba Free Press, qu'il acheta en 1898. Longtemps après sa mort, ce journal continua à diffuser les opinions du Parti libéral.
Un désaccord avec Laurier amena Sifton à démissionner en 1905. Puis il se mit à spéculer sur des industries extractives, les transports et d'autres secteurs, généralement avec succès. Il avait amassé à la fin de sa vie une fortune considérable, mais ce chef de dynastie était atteint d'une tare qui fit que la plupart des membres des deux générations suivantes n'atteignirent pas cinquante ans. La disparition répétée de membres de la famille à des moments critiques limita sans aucun doute I'influence subséquente de cette dernière sur les affaires publiques.
Les cinq fils de Clifford entrèrent dans les affaires sur les traces de leur père. L'aîné, John Wright, devint secrétaire-trésorier du Free Press. Le troisième, Henry Arthur, fut un candidat libéral malheureux et président de la société de portefeuille de la famille, I'Armadale Corporation. Le deuxième fils, Winfield Burrows, qui alla en Angleterre durant la Première Guerre mondiale pour vendre du matériel de guerre, eut une carrière plus mouvementée. Après I'Armistice, il s'associa à plusieurs compagnies portant des noms aussi insolites que I'Anglo-Canadian Association of Roumanian Trade et la Venezuelan Estates & Oil Company, qui firent toutes faillite. Ces faillites étaient souvent suivies de procès et de I'envoi de chèques appréciables par I'aîné des Sifton. Winfield réussit également à intéresser sir Clifford, qui fondait de grands espoirs sur son fils, au projet de la Montreal, Ottawa and Georgian Bay Canal Company. Ce projet, dans le cadre duquel aurait été construit un vaste complexe d'énergie hydro-électrique et de transports, entraîna finalement les Sifton dans de vains litiges, qui durèrent une dizaine d'années, et fit perdre aux actionnaires toutes les sommes qu'ils y avaient investies. Assagi, Winfield finit par rentrer à Toronto, où il mourut en 1928, à l'âge de trente-huit ans.
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