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Nouvelles de la Bibliothèque nationale
Juillet 1998
Vol. 30, nº 7-8
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De la Collection des livres rares...
par Michel Brisebois,
bibliothécaire des livres rares, Services de recherche et d'information
Albert Laberge, 1871-1960. La Scouine. [Montréal] : Imprimerie modèle, 1918. 134 p. Broché.
Ce n'est que depuis la publication par Gérard Bessette en 1963 de l'Anthologie d'Albert Laberge que le nom de cet écrivain est connu du grand public. Personnage excentrique et anticlérical, écrivain pessimiste dans la tradition du naturalisme français, Albert Laberge avait tout pour attirer une attention posthume. Sa popularité s'étendit ensuite aux bibliophiles qui s'arrachaient ses ouvrages publiés en édition hors-commerce et à tirage très limité.
Albert Laberge est né en 1871 sur une ferme à Beauharnois, près de Montréal. Après des études classiques abrégées, il n'eût qu'un emploi, celui de journaliste à La Presse de 1896 à sa retraite en 1932. Chose étonnante, cet amateur des lettres et des arts occupa la fonction de chroniqueur sportif à laquelle s'ajouta par la suite celle de critique d'art. De 1899 à 1917, il écrit les divers épisodes de son roman La Scouine et en fait paraître des extraits dans divers journaux dont La Semaine. Accusé d'anticléricalisme par l'archevêque de Montréal, Mgr Bruchési, ce journal doit suspendre ses activités et Laberge est vivement pris à partie pour atteinte aux bonnes moeurs. En 1918, le roman est publié à compte d'auteur et tiré à seulement 60 exemplaires numérotés et signés par l'auteur.
Une version anglaise a été publiée en 1977 sous le titre Bitter Bread. La Scouine est reconnu aujourd'hui comme le premier roman naturaliste publié au Canada français. En bref, La Scouine raconte l'histoire des membres de la famille Deschamps et de l'une des filles, Paulina, dont le surnom La Scouine (sans signification précise), sert de titre au roman. En de nombreux tableaux sans grande unité, Laberge y décrit la laideur et les difficultés de la vie à la campagne et relate les aventures souvent tragiques de personnages cruels et mesquins.
Albert Laberge (tiré de La Scouine).
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Ce n'est qu'après sa retraite, en 1932, que Laberge a pu poursuivre son oeuvre en publiant ses ouvrages entre 1936 et 1955. Il en publiera quatorze au total, surtout des recueils de contes et nouvelles. Aujourd'hui ses ouvrages les plus recherchés, outre La Scouine, sont ses recueils de souvenirs et de critiques dont Peintres et écrivains d'hier et d'aujourd'hui (1938), Journalistes, écrivains et artistes (1945) ainsi que Propos sur nos écrivains (1954). Laberge s'éteignit en 1960 dans sa maison de Montréal, entouré de ses livres et de ses tableaux.
La majorité des manuscrits de Laberge sont conservés à l'Université d'Ottawa. La Bibliothèque nationale du Canada possède deux exemplaires de La Scouine, dont un provient du don fait par André Marchand. Ce roman est certainement un des plus rares de la littérature québécoise du vingtième siècle.
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