Faits authentiques tirés des dossiers officiels
La collection de romans en fascicules en anglais de Bibliothèque et Archives Canada
La collection de romans en fascicules en anglais de Bibliothèque et Archives Canada a été surnommée « Collection Valentine » par le personnel. Ce surnom fait référence à Al Valentine, qui a probablement été l'éditeur le plus important de l'âge d'or de l'industrie du roman en fascicule au Canada anglais.
Valentine travaillait comme imprimeur lorsque les éditeurs Lou et Moe Ruby lui ont demandé de produire un numéro d'un de leurs fascicules, une publication à scandale intitulée The Tattler, au moment où ils faisaient face à des accusations d'outrage aux bonnes mœurs (Strange et Loo, 2004, p. 5). Valentine a accepté de leur rendre ce service. Ce geste, qui aurait pu marquer le début d'une belle amitié, a plutôt marqué le début d'une belle rivalité.
Flairant rapidement le potentiel lucratif de l'industrie de l'édition, et en particulier de l'édition de romans en fascicules, Valentine a commencé à produire ses propres fascicules, dont Confessions of a Gorgeous Hussy. Il a ensuite élargi son entreprise en achetant des publications d'autres éditeurs.
À la suite de l'adoption de la Loi sur la conservation des changes en temps de guerre en 1940, plusieurs nouveaux éditeurs ont vu le jour, dont la plupart avaient leurs bureaux à Toronto. Un survol rapide des couvertures des fascicules publiés entre 1940 et 1948 permet de dresser la liste des entreprises opportunistes qui se sont empressées de combler le vide laissé par la disparition des fascicules américains. Les éditeurs Adam Publishing, Daring Publishing, Laff Publishing, Norman Book Company, Pastime Publications Ltd., Al White Publications et Merchants House se sont tous soudainement imposés sur le marché. Ils publiaient des titres tels que Bill Wayne's Western Magazine, College Sports, Dare-Devil Detective Stories, Daring Confessions, Dynamic Action Tales, Stag, Startling Crime Cases et Uncanny Tales.
Ces éditeurs formaient une industrie diversifiée et colorée. Certains prospéraient, d'autres dépérissaient. Mais au début de 1948, la plupart des entreprises qui avaient survécu sont passées aux mains d'une seule compagnie : Alval Publishers of Canada Ltd d'Al Valentine.
Sa dominance allait cependant se révéler relativement éphémère, car le succès de l'industrie canadienne du roman en fascicule allait s'éteindre au milieu des années 1950 1. Des décennies allaient s'écouler avant que les romans en fascicules ne retiennent à nouveau l'attention du public, ou plus précisément d'un membre de la fonction publique.
En 1996, un commerçant de livres de Toronto a découvert les publications qui allaient devenir la Collection de romans en fascicules. Il a communiqué avec Michel Brisebois, à cette époque conservateur des livres rares de la Bibliothèque nationale du Canada (maintenant Bibliothèque et Archives Canada). Dès qu'il a examiné les documents, Michel Brisebois a su qu'il venait de mettre la main sur une collection très spéciale : « Je travaillais dans ce domaine depuis longtemps, et je n'en avais jamais vu. Je savais donc qu'il s'agissait de publications rares. » [traduction] (Rynor, 2004, en ligne) Face aux réticences polies et aux haussements de sourcils de ses collègues, M. Brisebois a établi le bien-fondé de l'acquisition de la collection en ces termes : « Nous nageons dans la culture américaine […] Il est important d'explorer notre propre culture populaire, même si elle n'est pas très inspirante. » [traduction] (Rynor, 2004, en ligne)
Aujourd'hui, la collection acquise en 1997 par l'ancienne Bibliothèque nationale du Canada compte plus de vingt boîtes de romans en fascicules, qui se rapportent à une panoplie de genres : romans policiers, romans d'amour, aventures de cow-boys et histoires « nordiques », humour, magazines pour hommes seulement, horreur, science-fiction et sports. La collection comprend aussi des dizaines de manuscrits originaux, des coupures de journaux et des photographies.
Les romans en fascicules de la collection de Bibliothèque et Archives Canada méritent tous les adjectifs que leur attribuaient leurs auteurs : ils sont osés (daring), dynamiques (dynamic), mondains (worldly), mystérieux (uncanny) et sensationnels (sensational). Ils sont aussi entièrement canadiens. Et c'est ce qui les rend si importants, même s'ils ne sont pas particulièrement inspirants.
Note
1. Pour de plus amples renseignements, consultez la section de ce site intitulée « Le déclin des romans en fascicules ».
Références
Rynor, Becky. « Criminal Treasures Buried in National Archives », Capital News Online, vol. 15, no 1 (2004), Carleton University School of Journalism (en ligne). http://temagami.carleton.ca/jmc/cnews/01102004/n2.shtml (consulté le 15 juin 2005)
Strange, Carolyn, et Tina Loo. True Crime, True North: the Golden Age of Canadian Pulp Magazines, Vancouver, Raincoast Books, 2004.