« Une description du monstre »
La collection de romans en fascicules en français de Bibliothèque et Archives Canada
-A-t-il donné une description du monstre?
-Il dit qu'il ressemble à un phoque gigantesque, avec un cou de giraffe…
-- Extrait de l'histoire « Le monstre du marécage »
Jean Larocque de la Gendarmerie royale
Les exploits de la police montée
L'industrie du roman en fascicule au Québec pouvait certainement se comparer à la bête dans « Le monstre du marécage » : la plupart de ses caractéristiques, bien que semblables à celles des industries prospères du Canada anglais et des États-Unis, se combinaient de façon à former une industrie innovatrice et unique.
Montréal était le cœur de l'industrie canadienne-française du roman en fascicule. Des éditeurs de Montréal tels que les Éditions populaires, les Éditions Bigalle et Police-Journal 1 publiaient des fascicules dont le contenu reflétait celui des fascicules publiés au Canada anglais. Au Québec, les fascicules (terme que l'on traduit par « livre » ou « brochure » en anglais) étaient cependant de plus petites dimensions que ceux du Canada anglais et environ deux fois plus courts, et ils contenaient généralement une seule histoire. Ils offraient une vaste gamme de genres, et les aventures de cow-boys, les romans d'amour et les romans policiers comptaient parmi les plus populaires.
Plusieurs de ces fascicules mettaient en vedette un seul personnage, dont les aventures se poursuivaient d'un numéro à l'autre. Semaine après semaine, les Québécois se laissaient transporter par Les exploits fantastiques de Max Beaumont, l'insaisissable aventurier et Les aventures étranges de l'agent IXE-13, l'as des espions canadiens. Même si ces personnages étaient de purs Canadiens français, le contenu et la couverture de leurs publications respectives présentaient « des liens évidents avec les fascicules américains et avec les illustrations traditionnelles dont les origines remontent aux récits français de Fantomas 2 et d'Arsène Lupin 3 » [traduction] (Culture of Cities, en ligne).
Ce type d'histoires en séries se retrouvait communément dans les fascicules américains, où des justiciers, des Superman et des espions comme The Shadow, Doc Savage et Operator #5 combattaient des ennemis redoutables et demeuraient dans des lieux exotiques. Par contre, on en voyait rarement dans les fascicules canadiens-anglais (du moins dans ceux de la collection de Bibliothèque et Archives Canada), qui racontaient pour la plupart des récits indépendants dont les personnages changeaient d'un numéro à l'autre.
D'autres entreprises, comme les Éditions Paris-Montréal, se consacraient plutôt à la réédition de livres d'auteurs français et européens populaires. Même si la Loi sur la conservation des changes en temps de guerre n'avait probablement aucune incidence sur l'importation de ces livres, il était difficile de se procurer des éditions originales après le début de la guerre (Culture of Cities, en ligne).
Certains romans policiers publiés au Québec, par exemple Mon magazine policier, adoptaient le même format et le même style que les fascicules du Canada anglais et des États-Unis. Ces romans pouvaient se vanter d'offrir de nombreuses histoires ainsi que des couvertures aux illustrations audacieuses et éloquentes et aux couleurs flamboyantes. Les histoires présentées étaient soit des œuvres d'auteurs québécois, soit des traductions d'histoires créées par des sommités du domaine, comme Ellery Queen, Agatha Christie et Arthur Conan Doyle. Ce type de fascicules ne représente toutefois qu'une faible proportion de l'industrie québécoise des romans en fascicules et une fraction des publications figurant dans la collection de Bibliothèque et Archives Canada.
Plutôt considérée comme un complément de la collection de romans en fascicules canadiens-anglais de Bibliothèque et Archives Canada, la collection de romans en français occupe néanmoins plus de vingt boîtes à magazines. Elle a été acquise en plusieurs petits lots chez un commerçant de livres de Montréal, au cours des années 2002 et 2003. L'archiviste John Bell a fait don de la plupart des numéros de l'Agent IXE-13.
Notes
1. Lorsqu'il a commencé à publier des romans d'amour, l'éditeur Police-Journal a changé d'identité pour adopter un nom plus sobre et moins masculin, les Éditions PJ.
2. Fantomas a été créé par Pierre Souvestre et Marcel Allain et a fait son apparition dans une histoire en série d'une publication mensuelle de Paris en 1911. Fantomas était un génie du crime qui faisait la guerre aux bourgeois de la ville, et ses exploits étaient extrêmement populaires. Les Éditions Paris, une entreprise montréalaise, ont publié de nombreuses rééditions d'autres romans de Marcel Allain, dont la couverture mentionnait qu'il était le créateur de Fantomas. Pour plus de renseignements, veuillez consulter l'excellent site Web de Jess Nevin, Fantastic Victoriana, au
www.geocities.com/jessnevins/vicintro.html (en anglais seulement) (consulté le 12 janvier 2005).
3. Arsène Lupin, le gentleman cambrioleur, a été créé par l'auteur français Maurice Leblanc en 1905 et Arsène Lupin a été le héros d'une vingtaine de nouvelles et de romans. Les Éditions Variétés ont réédité des aventures populaires de Lupin au Québec. Pour plus de renseignements, veuillez consulter l'excellent site Web de Jess Nevin, Fantastic Victoriana, au
www.geocities.com/jessnevins/vicintro.html (en anglais seulement) (consulté le 12 janvier 2005).
Référence
« Quebec's romans en fascicules », Culture of Cities: Print Culture and Urban Visuality (en ligne). www.arts.mcgill.ca/programs/AHCS/cultureofcities/Gallery3/front.html (consulté le 15 juin 2005)