LA FIN TRAGIQUE DU GÉANT DES MERS - 1601 MORTS
Le Drame Apparaît dans toute son Horreur
Maintenant que le Rideau du Doute est Levé
Effroyables Récits des Survivants du « Titanic » Conduite Héroique des Passagers et de l’Equipage.
C’est avec angoisse que le monde entier attendait des détails sur l’épouvantable désastre du « Titanic », et c’est avec horreur [illegible] les a appris, car ces détails dépassent tout ce que l’imagination avait pu rêver de plus poignant et de plus dramatique. La [liste?] des morts atteint maintenant le chiffre énorme de 1,601 personnes, car le « Carpathia » n’a ramené à New York que 745 survivants, sur les 2,346 personnes qui étaient les passagers et l’équipage du plus gros navire du monde. Le récit du naufrage en [illegible] nuit, par un froid glacial et sur une mer houleuse, forme une des pages les plus noires de l’histoire de la navigation, et en [illegible] saisi d’effroi en lisant les narrations de ceux qui ont échappé au désastre. Le « Titanic » lancé à toute la vitesse de ses [illegible] machines, voulait dépasser tous les records du monde. Il n’a réussi qu’a dépasser celui des désastres. On aurait pu [illegible] tous les passagers et tout l’équipage si le nombre des canots de sauvetage eût été suffisant, mais ceux qui croyaient le « Titanic » à l’épreuve de tous les dangers des mers constatent aujourd’hui leur fatale erreur, et comprennent comment ils ont [illegible] à la mort plus de la moitie des passagers et de l’équipage du vaisseau géant. Tout l’héroisme dont ont fait preuve les [officiers ?] supérieurs et certains des passagers ne pourra effacer cette terrible responsabilité qui pèse sur les autorités permettant au « Titanic » de quitter son quai sans avoir à bord les moyens de secourir les passager en cas de détresse.
Toute l’ignominie de ce sacrifice humain s’adresse à elles et c’est elles qui devront trouver les moyens d’en empêcher la pétition. Les membres de l’équipage semblent avoir fait leur devoir à bord du navire, si on en excepte certaines des chauffeurs et maîtres-d’hôtel qui ont pris dans les chaloupes des places appartenant aux passagers. Toutes les femmes ont été sauvées, sauf elles qui ont refusé d’être et on croit aussi que tous les enfants ont été épargnés. D’autres scènes, hélas ! sont [illegible] autres.
Il est clair, d’après les récits des survivants, que le navire n’a pas frappé l’iceberg da sa proue, mais a seulement effleuré montagne de glace qui a déchiré ses flancs de l’avant à l’arrière, éventrant ses tôles d’acier et y ouvrant une voie d’eau impossible à aveugler. Alors que les passagers, croyant que le navire ne pouvait couler, attendaient avec confiance l’arrivée des secours, les officiers savaient que le mal était irréparable, et ils ont attendu la mort de pied ferme.
Les passagers sauvés, réunis en comité, ont déploré surtout l’absence de moyens de sauvetage, et ont demandé une intervention des gouvernements de tous les pays pour mettre fin à un état de choses qui semble régner sur tous les paquebots du monde.
LE RECIT PALPITANT DE LA CATASTROPHE
Par un des passagers du « Titanic », M. Beasley, de Londres
« Le voyage à partir de Queenstown s’est passé sans incidents ; le temps était très beau et la mer très calme. Le vent qui soufflait du sud-ouest était très froid, surtout les derniers jours. Dimanche soir, j’étais couché depuis dix minutes, quand vers 11.15 heures je sentis une légère secousse et quelques instants après une secousse plus forte, mais cependant pas assez violente pour effrayer personne, même la femme plus nerveuse. Les machines s’étaient arrêtées et ma première pensée a été « on a perdu une hélice ». Je monte sur le pont supérieur après m’être enveloppé d’une robe de chambre et j’y trouvai seulement quelques passagers qui s’y étaient également rendus pour
PAS D’ANXIETE
connaître la raison de l’arrêt subit des machines. Nous n’éprouvions aucune anxiété et nous aperçûmes en regardait par les hublots, un groupe d’hommes qui jouaient aux cartes et paraissaient très peu inquiets, nous entrâmes au fumoir et leur demandâmes s’ils avaient senti quelque chose. Ils nous répondirent qu’ils avaient senti un léger choc et qu’un regardant par la fenêtre, ils avaient vu un immense iceberg qui passait tout près du navire. Ils avaient cru que le bateau avait simplement frôlé la banquise et que les machines avaient été arrêtées pour s’assurer si le « Titanic » avait subi quelques dommages.
Personne ne croyait à cet instant que le fond du transatlantique avait été déchiré par la masse de glace submergée. Les joueurs continuèrent leur partie et je retournai à ma cabine pour y attendre qu’on se remit en marche. Je n’ai plus jamais revu ni les joueurs ni ceux qui se trouvaient avec moi sur le pont. Peu après, je remontai sur le pont et j’y trouvai un grand nombre de passagers qui, ayant été réveillés par l’arrêt des machines après avoir été accoutumés pendant quatre jours aux trépidations et vibrations, voulaient savoir ce qui se passait. Je m’aperçus alors que le vapeur plongeait légèrement de l’avant, mais je crus que quelques-uns des compartiments d’avant s’étaient remplis
LE CRI D’ALARME
d’eau. Je redescendis mettre des habillements plus chauds et pendant que je m’habillais j’entendis quelqu’un criait : « Tous les passagers sur le pont et munissez-vous des ceintures de sauvetage. »
Nous allons et venions tous lentement et sans la moindre excitation.
Nous montâmes tous doucement, avec ces ceintures attachées sur nos vêtements : mais présumions que c’était simplement une précaution prise par le capitaine, et que nous pourrions bientôt aller nous recoucher.
PAS DE PANIQUE
Il n’y avait aucune panique, ni expression d’alarme et je suppose que cela était causé par le calme profond de la nuit et l’absence de tout signe d’accident. Le navire était immobile et n’avait qu’un léger mouvement de descente que pas une personne sur dix ne pouvait remarquer : aucun signe du désastre approchant n’était visible. Puis, quelques moment après, nous vîmes que l’on découvrait les bateaux de sauvetage et les hommes d’équipage attachés à chacun d’eaux, commencer à dérouler les cordes et abaisser les bateaux.
Alors, nous commençâmes à réaliser que c’était plus sérieux, que nous ne l’avions supposé tout d’abord, et ma première pensée fut de descendre pour prendre des vêtements et un peu d’argent : mais voyant les gens montant en foule les escaliers, j’ai résolu de rester pour ne pas créer de confusion. Aussitôt nous entendîmes l’ordre.
« Tous les hommes en arrière pour dégager les bateaux et toutes les femmes sur le pont inférieur, le pont du fumoir ou pont « B’.’
Les hommes se reculèrent et observèrent un silence absolu, les uns accotés è la balustrade, les autres se promenant. Les bateaux furent descendus du pont « A ». Quand ils fureut à la hauteur du pont « B », où toutes les femmes étaient assemblées, celles-ci s’y placèrent lentement, à l’exception de quelques-unes qui refusaient de laisser leurs maris. En certains cas elles furent arrachées des bras de ceux-ci et poussées dans les bateaux, mais en général on ne s’oppose à leur volonté de rester à bord.
EN CHALOUPE
« Regardant sur les côtés, on vit des bateaux déjà sur l’eau, et s’éloignant tranquillement dans l’ombre, et puis les bateaux qui étaient près de moi, furent abaissés, les cordes neuves craquant à mesure qu’ils descendaient la hauteur de 90 pieds qui les séparaient de l’eau. Un officier en uniforme arriva, au moment où un bateau descendait et cria : « Quand vous serez sur l’eau, ramez jusqu’à la grande échelle et attendez avec les autres bateaux pour les ordres. »
« Oui, oui, fut la réponse, mais je ne pense pas qu’aucun bateau était capable, d’obéir à ces ordres. Quand ils touchèrent l’eau et commencèrent à ramer, les personnes se trouvant dans ces bateaux voyant le navire s’enfoncer lentement étaient si alarmées que les marins préférèrent s’éloigner pour sauver au moins quelques vies. Ils savaient sans doute, que la succion d’un vaisseau si énorme était excessivement dangereuse. Pendant tout ce temps, on ne remarque aucun désordre, aucune panique, et pas de femmes tombant dans des cries d’hystérie, comme on pourrait s’y attendre dans de telles circonstances.
SUPERBE SANGFROID
C’est extraordinaire comment tous, réalisant même que nous pouvions être engloutis en un moment dans la mer, nous avons gardé tout notre sang froid.
« Un par un, les bateaux furent remplis de femmes et d’enfants s’abaissèrent et disparurent dans la nuit. Bientôt on annonça que les hommes allaient être embarqués dans les bateaux de sauvetage à tribord.
La plupart des hommes traversèrent de l’autre côté du pont, tandis que je restais où j’étais. Puis, j’entendais l’appel : « Encore des femmes » que l’on répéta une seconde fois. Un homme d’équipage me demanda : « Y a-t-il encore des femmes sur votre pont ? » Je répondis « Non ». Vous ferez mieux de sauter, me dit-il alors.
Je sautai et tombai au fond du bateau au moment où ils criaient « abaissez ». Comme le bateau commençait à descendre, deux femmes furent poussées précipitamment dans le bateau ainsi qu’un bébé de dix mois. Et nous descendîmes, et quand nous touchâmes l’eau, nous éprouvâmes alors une terrible anxiété. Le tuyau d’échappement nous inondait de son jet et la mer nous rejetait sur le flanc du navire. Ni officier, ni homme d’équipage n’était dans notre bateau. Les cordes nous retenaient toujours et le bateau No 14 que l’on venait de remplir descendait rapidement sur nous. Nous eûmes beau crier ainsi que ceux du 14, d’arrêter la descente, rien, le bateau allait s’abattre sur nos têtes et nous écraser, lorsque l’un de nous réussit à couper les cordes qui nous retenaient et nous fûmes vite projetés au loin par la vapeur s’échappant du tuyau.
Il y avait avec nous deux cuisiniers et un chauffeur; comme on discutait quelle direction nous allions prendre, on décida de référer la chose au chauffeur qui tenait le gouvernail et de lui obéir. Il s’approcha le plus possible des autres bateaux, de façon que les navires qui venaient à notre aide puissent nous trouver plus facilement.
UNE IDEALE NUIT
Il était à ce moment environ 1 hr. du matin; une belle nuit étoilée, sans lune et par conséquent pas trop claire. La mer était aussi calme qu’une mare, une nuit idéale si ce n’est le terrible froid que ressentait quelqu’un dans un bateau sur l’immensité de l’écran. C’était bien une chance, cependant, d’avoir une mer aussi calme, alors qu’elle portait des centaines de milles de la terre.
Le chauffeur nous dit que depuis 25 ans qu’il voyageait sur l’océan, il n’avait jamais vu une nuit aussi calm. A mesure que nous nous éloignions du « Titanic », nous regardions de temps en temps, et nous eûmes là un spectacle féerique. Durant le voyage, j’avais dit à quelques compagnons, qu’une fois arrivé à New York, je prendrais l’occasion de regarder l’immense bateau de loin, pour mieux réaliser en grandeur. Nous ne pensions pas que notre désir aurait sitôt exaucé. L’on ne s’apercevait guère qu’il était frappé à mort, si ce n’est qu’il était un peu penché et que l’eau atteignait la dernière rangée des hublots. Nous décidâmes de nous éloigner le plus possible de façon à ne pas nous faire engloutir dans je tourbillon.
LE NAVIRE SOMBRE
Vers les 2 heures, autant que je peux me souvenir, nous vîmes le « Titanic » s’enfoncer rapidement, avec la proue et le pont complètement submergés et nous concluâmes qu’il ne s’agissait plus que d’une question de minutes avant qu’il ne coule, et ce fut vrai. Il piqua du nez lentement et à ce moment les lumières qui s’étaient éteintes depuis un moment se réallumèrent, puis s’éteignirent de nouveau pour toujours.
En même temps, les machines grondèrent dans les entrailles du navire avec un bruit terrible qui aurait pu être entendu à des milles de distance, le bruit le plus affreux sûrement qui puisse être entendu au milieu de l’océan à mille milles de la terre. Mais ceci n’était pas tout à fait la fin. A notre surprise, il demeura dans cette position pendant un temps que j’estimerais à cinq minutes : quelques autres personnes disent que ce fut moins long, mais quoi qu’il en soit, nous vîmes certainement au moins 150 pieds de l’immense longueur du « Titanic » se dressant dans le ciel au-dessus du niveau de la mer. Puis, par une chute lente et inclinée, il disparut sous les eaux, et nos yeux venaient de voir pour la dernière fois le vaisseau gigantesque sur lequel nous avions quitté Southampton, mercredi.
FROID TERRIBLE
Et nous n’avions plus devant nous qu’une chétive embarcation surchargée de gens, vêtus de toutes les façons possibles et inimaginables, le firmament net, sans nuage, étincelant d’étoiles, un froid cruel nous faisait grelotter et nous désirions vivement avoir notre tour de ramer pour trouver un peu de soulagement, dans cet exercice – un froid étrange, meurtrier, comme jamais nous n’en avions ressenti avant.
A LA NAGE
« Et alors, par-dessus tout cela, les cris de centains de nos semblables qui nageaient dans la mer glacée en poussant des lamentations qui ne seraient jamais entendues, nous le savions bien. Nous étions tentés de retourner vers ceux qui nageaient encore, mais nous savions bien que c’était impossible de les sauver et, que nous nous perdrions nous-mêmes dans un sacrifice inutile.
« Nous essayâmes de chauter pour empêcher les femmes d’entendre les cris, et ramions fort pour nous éloigner du théâtre du naufrage.
« Nous regardions constamment au loin dans l’espérance d’apercevoir une lueur. Soudain, vers le lointain, une petite lueur qui bientôt s’approcha nous prouva qu’un navire marchait sur nous.
CHANTAIT LES GARS !
L’espérance renaissait, mais nous avions grande peur que ce ne fut que deux chaloupes de sauvetage. Mais, à notre grande joie, nous constatâmes qu’elles avançaient ensemble : c’étaient les feux de mât et de la proue d’un navire sauveteur. Le timonier cria alors : « Chantes, les gars ! » et nous chantâmes de tout cœur, tandis que des larmes mouillaient nos paupières. Nous sentions que nous étions sauvés. Cependant, on n’était pas joyeux, je vous en assure : le hourrah que nous poussâmes ensuite avait plus de vigueur. Il n’est pas besoin de garder la mesure pour crier un « hurrah ! »
LE SALUT
Notre sauveteur arrivait rapidement, et, comme le bateau tournait lentement, nous vîmes ses cabines toutes éclairées, et nous comprîmes que c’était un très grand navire. Il était maintenant immobile, et nous dûmes nous diriger vers lui à force de rames. Le jour se levait, un lever de soleil aux reflets roses et aux teintes variées à l’horizon lointain, et le croissant argenté de la lune disparaissait au firmament. « Retournez votre argent mes amis cria le marin qui conduisait notre chaloupe, bien entendu, ajouta-t-il, si vous en avez en poche. » Nous ne pûmes nous empêcher de sourire à cette manifestation de superstition à un pareil moment.
LE No. 13
Notre ami continua ! « Je ne croirai plus jamais que le numéro 13 est malchanceux car la chaloupe 13 a été notre meilleur ami. » Le numéro 16 sera certainement à l’avenir un signe de chance plutôt que de malheur pour les passagers du « Titanic » qui se trouvaient à bord de cette chaloupe. Comme nous approchions du « Carpathia », nous pouvions voir ce qui paraissait des voiliers, toutes voiles dehors, qui se trouvaient dans les environs et sous crûmes que c’étaient des barques de pêche des bancs de Terre-Neuve, qui attendaient si elles pourraient être de quelque secours. Quelques instants plus tard, comme la clarté augmentait, nous comprîmes que ce n’étaient que des glaces qui brillaient des premiers feux du jour. Le vapeur que nous venions d’entendre en était tout entouré et nous sûmes faire sa détour pour arriver au « Carpathia », que nous atteignîmes vers 9:30 heures du matin, et sur lequel nous fûmes bientôt hissé.
SUR LE « CARPATHIA »
« Nous fûmes reçus avec chaleur et je veux dire ici que personne ne pourrait exprimer la reconnaissance que doivent les survivants du « Titanic » au capitaine, officiers équipage et passagers du « Carpathia ».. Ils ont dû, en plein océan, sans aucun avis, se préparer à recevoir, croyaient-ils, 3,000 personnes, et ils s’y préparèrent sans un murmure et avec la meilleure grâce du monde. Des repas bien chauds, des couvertures et des lits avaient été préparés et chaque naufragé, en montant à bord, était immédiatement réconforté et soigné.
Les passagers du « Carpathia » fournirent des vêtements et de l’argent. Les hommes abandonnèrent leurs lits et se couchèrent sur le plancher du fumoir ou n’importe où pour permettre de soigner les naufragés.
« Le navire a envoyé des milliers de marconigrammes sans accepter de paiement. On n’aurait pu être mieux nourris si on avait été des passagers réguliers du « Carpathia ».
« Le capitaine n’a permis l’envoi d’aucune dépêche aux journaux, excepté la liste complète des survivants et vingt mots d’explication du désastre, avant que tous les messages privés aient été expédies. »
Cette histoire telle qu’elle parait ci-dessus ; vient de M. L. Beasley, un étudiant de l’Université de Cambridge et qui demeure à Londres, Angleterre. M. Beasley voyageait en seconde mais son nom n’avait pas paru dans les listes des rescapés.