d'après CP et UPI
EDMONTON
Wayne Gretzky, le trésor le plus précieux du sport canadien, a été échangé par les Oilers d'Edmonton -- les champions de la Coupe Stanley -- aux Kings de Los Angeles, hier, dans ce qui est la plus grosse transaction de l'histoire de la ligue Nationale de hockey.
Le meilleur joueur de sa génération, sinon de tous les temps, est au cœur d'un échange qui inclut quatre autres joueurs, trois choix de première ronde et plus de 10 millions en dollars américains.
Deux coéquipiers de Gretzky chez les Oilers, l'attaquant Mike Krushelnyski et le défenseur Marty McSorley, le suivront à Los Angeles.
Les Oilers obtiennent en retour le centre Jimmy Carson, qui a inscrit 55 buts la saison dernière, sa deuxième dans la LNH, le choix de première ronde des Kings en 1988, Martin Gélinas, le premier choix des Kings en 1989, 1991 et 1992, et plus de 10 millions en dollars américains, a précisé le propriétaire des Kings, Bruce McNall.
C'est Gretzky qui avait demande à être échangé.
« Wayne a tellement donné à la ville d'Edmonton et au hockey au cours de la dernière décennie qu'il avait le droit, à mon avis, de dicter son propre avenir », a déclaré Peter Pocklington, le propriétaire des Oilers.
« J'ai le sentiment d'être assez jeune et encore assez bon pour aider une nouvelle organisation à remporter une Coupe Stanley », a pour sa part dit Gretzky au cours d'une conférence de presse à laquelle assistaient une centaine de journalistes. Il a ajouté qu'il avait aussi souhaité être échangé pour des raisons personnelles, plus précisément « pour le bonheur de Wayne Gretzky, de ma nouvelle femme et de l'enfant que nous attendons au début de l'année prochaine.
Il fond en larmes
« Je suis déçu de quitter Edmonton, a ajouté Gretzky. J'admire tous les partisans et j'ai respecté tout le monde au fil des année, mais… »
En prononçant ces mots, Gretzky a fondu en larmes. Il a pris congé des journalistes pour un instant, dans l'espoir de reprendre le contrôle de ses émotions.
L'entraîneur et président-directeur général des Oilers, Glen Sather, a lui aussi paru ému en commentant la transaction. Sather a déclaré d'une voix chevrotante qu'il répugnait à l'idée de se départir de Gretzky, mais que l'échange était bon « pour Wayne, pour les Oilers et pour la ligue Nationale de hockey ».
À son retour devant les journalistes, Gretzky a insisté sur l'importance que revétait son passage à Los Angeles pour sa famille. Il s'est marié il y a trois semaines à une actrice de Hollywood, Janet Jones; la cérémonie était en quelque sorte la version canadienne d'un mariage royal…
Gretzky a indiqué que sa femme n'avait pas insisté auprès de lui pour qu'il soit échangé. « La décision est la mienne, a-t-il dit.
« Qui porte les pantalons? »
Mais il s'est trouvé des partisans des Oilers pour condamner Janet Jones dans cette transaction.
« Ce serait intéressant de savoir qui a vraiment pris l'initiative, a déclaré Joy McKenna, interviewé au centre-ville d'Edmonton. Demandez-lui qui porte les pantalons dans la maison. »
La nouvelle de la transaction a poussé plusieurs fans des Oilers à envahir d'appels les tribunes téléphoniques à la radio. D'autres ont pris d'assaut les 21 lignes téléphoniques des bureaux des Oilers, se plaignant et menaçant d'annuler leurs abonnements de saison.
Des intervenants à une tribune téléphonique ont même comparé Janet Jones à Yoko Ono, dont le mariage avec John Lennon avait été pour plusieurs la cause de la dissolution des Beatles, en 1970.
À Ottawa, un député a émis le souhait que le gouvernement intervienne pour annuler la transaction.
« Wayne Gretzky est un symbole national, comme le castor… Comment peut-on permettre la vente d'un de nos symboles canadiens? » a demandé Nelson Riis, le leader parlementaire du Nouveau Parti démocratique.
Pour vendre le hockey a L.A.
Bruce McNall, le propriétaire des Kings, a déclaré avant l'annonce de la transaction qu'il s'était senti obligé de transiger en dépit du prix élevé.
« Je dois faire quelque chose de radical pour vendre le hockey à Los Angeles, et il n'y a aucun nom dans le hockey qui puisse égaler celui de Wayne Gretzky », a déclaré McNall.
Gretzky pourrait en effet donner beaucoup de lustre aux Kings, qui n'ont jamais rien gagné, dans une ville dont l'appétit pour les vedettes est insatiable.
Il est très peu souvent arrivé, dans l'histoire du sport professionnel, qu'un joueur dans la force de l'âge et aussi dominant que Gretzky soit échangé. La transaction d'hier fait penser aux échanges dans lesquels ont été impliqués le joueur de baseball Babe Ruth, et les joueurs de basketball Kareem Abdul-Jabbar et Wilt Chamberlain. L'émotion soulevée à travers le Canada a d'autre part rivalisé avec l'outrage que le Brésil a ressenti quand le joueur de soccer Pelé a quitté son pays pour les États-Unis.
Le contrat de Gretzky, qui lui rapporte $900 000 par année, est encore valide pour quatre saisons. Il touche aussi le double chaque année pour annoncer plusieurs produits.
Gretzky détient une douzaine de records de la LNH, a remporté plus de trophées que quiconque, dont celui remis au joueur le plus utile huit fois en neuf saisons, et mené les Oilers à quatre championnats de la Coupe Stanley au cours des cinq dernières saisons.
Il détient le record pour le plus grand nombre de buts (92), d'aides (163) et de points (215) en une saison. Il est aussi le meneur de l'histoire de la LNH au chapitre des aides avec 1 086.