Peuple

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Le mot peuple est une notion polysémique dont le sens varie selon le contexte. Il désigne à la fois :

  • un « ensemble des individus constituant une nation, vivant sur un même territoire et soumis aux mêmes lois, aux mêmes institutions politiques »[1]. Ici, le peuple est déterminé par la nation qu'il constitue, le territoire qu'il occupe et la soumission aux mêmes règles de droit. C'est la vision la plus restreinte du peuple.
  • un « ensemble des humains vivant en société sur un territoire déterminé et qui, ayant parfois une communauté d'origine, présentent une homogénéité relative de civilisation et sont liés par un certain nombre de coutumes et d'institutions communes »[1]. Ici, le peuple est déterminé par un territoire et une culture propres, mais pas par la soumission aux lois.
  • un « ensemble de personnes qui, n'habitant pas un même territoire mais ayant une même origine ethnique ou une même religion, ont le sentiment d'appartenir à une même communauté »[1]. Ici, le peuple n'est défini que par une culture, voire une tradition commune. C'est la vision la plus étendue de la notion de peuple.

Étymologie et histoire[modifier | modifier le code]

Le mot peuple est issu du latin populus désignant l'ensemble des citoyens (universi cives), individus ayant le pouvoir de voter dans la constitution romaine, et qui s'oppose aux classes dominantes[1]. Dans la Rome antique, populus désignait l'ensemble des citoyens romains. Cicéron écrit dans La République :

« Par peuple, il faut entendre, non tout un assemblage d'hommes groupés en un troupeau d'une manière quelconque, mais un groupe nombreux d'hommes associés les uns aux autres par leur adhésion à une même loi et par une certaine communauté d'intérêt. »

Populus désigne aussi le peuplier en latin, peut-être parce que cet arbre était fréquemment planté « par les Romains dans les lieux publics ou qu'ils poussent souvent en groupes denses, comme une foule humaine »[2].

Les Grecs anciens distinguaient plusieurs nuances dans ce que nous appelons aujourd'hui le peuple. Le genos soulignait l'origine commune des Grecs. L'ethnos comprenait aussi cette idée en y ajoutant celle d'une culture commune. Le laos désignait plutôt la foule assemblée. Le demos incluait l'ensemble des citoyens.

Les termes peuple et nation ont des histoires différentes, toutefois, à partir de l'émergence du nationalisme au XIXe siècle, un rapprochement s’opère[réf. nécessaire].

Signification[modifier | modifier le code]

Ce terme désigne couramment un ensemble d'êtres humains vivant sur le même territoire ou ayant en commun une culture, des mœurs, un système de gouvernement. Ceux-ci forment à un moment donné une communauté partageant majoritairement un sentiment d'appartenance durable, une communauté de destins. Ce sentiment d'appartenance peut venir de l'une au moins de ces caractéristiques : un passé commun, réel ou supposé, un territoire commun, une langue commune, une religion commune, des valeurs communes, un sentiment d'appartenance[1].

Avec le développement des nationalités au XIXe siècle[3], la notion peuple est liée à une construction politique : dans le droit fil de son étymologie latine, un groupe social reconnu comme « un peuple » se voit défini comme un groupe ayant des droits politiques spécifiques, voire le droit de former une nation souveraine. Par exemple, la Constitution de la Ve République française indique ainsi que le « principe [de la République] est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple »[4], et la Charte de l'Atlantique entérine cette lecture en déclarant le « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ».

Dès lors, la réponse à la question Qu'est-ce qu'un peuple ? n'est jamais neutre ou objectivable[réf. nécessaire]. Deux écoles, française (à partir du XVIIIe siècle) et allemande (à partir du début du XIXe siècle), y ont répondu différemment, suivant des critères reflétant les événements politiques et sociaux respectivement vécus[5]. Ce n'est pas une définition objective mais le produit d'une construction sociale[réf. nécessaire]. Les anthropologues et politistes critiquent cette notion en la mettant en perspective[réf. nécessaire].

Dans son livre Comment le peuple juif fut inventé (2008), l'historien israélien Shlomo Sand renouvelle la réflexion sur le rapport peuple-nation à partir de l'exemple du rapport juif-israélien et décrit un processus de construction d'un « peuple ».

Qualification péjorative[modifier | modifier le code]

En français, le terme de peuple peut avoir aussi une connotation péjorative, envers ceux qui y appartiendraient ou non. Il désigne alors :

  • les personnes de condition modeste, par opposition aux catégories supérieures ou privilégiées par la naissance, la culture et/ou la fortune.
  • les personnes appartenant aux classes « inférieures » et éventuellement moyennes de la société, par opposition à l'« aristocratie ». Par exemple, Hervé Bazin écrit en 1948 : « il y a aussi le peuple, qui fait si grossièrement fi de l'humanisme [...]. Le peuple, à qui fut accordé par les radicaux le privilège exorbitant d’avoir par tête de pipe autant de droits civils et politiques qu’un Rezeau, le peuple, non pas populus mais plebs, ce magma grouillant d'existences obscures et désagréablement suantes... Le peuple (à prononcer du bout des lèvres comme peu ou même comme peuh !) »[6].

Dans le monde[modifier | modifier le code]

Europe[modifier | modifier le code]

France[modifier | modifier le code]

En France, dans l'esprit de la Constitution, le peuple est souverain.

L'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 est ainsi rédigé[7] :

« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »
« Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. »
« Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret. »
« Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. »

Royaume-Uni[modifier | modifier le code]

République fédérale d'Allemagne[modifier | modifier le code]

Italie[modifier | modifier le code]

Espagne[modifier | modifier le code]

Suisse[modifier | modifier le code]

Rappelons que la Suisse n'est pas membre de l'Union européenne.

Autriche[modifier | modifier le code]

Hongrie[modifier | modifier le code]

Pologne[modifier | modifier le code]

Autres pays[modifier | modifier le code]

Amérique[modifier | modifier le code]

Canada[modifier | modifier le code]

États-Unis[modifier | modifier le code]

La Constitution des États-Unis est introduite par la célèbre formule We the People (« Nous le Peuple »). Cette formule est devenue un symbole fort de la démocratie américaine, pourtant, la notion de peuple aux États-Unis a été évolutive. En effet, la République américaine se veut à l'origine une démocratie de grands propriétaires terriens et de gens lettrés des villes. Seules ces couches sociales participaient d'ailleurs effectivement aux affaires politiques nationales. Il faut attendre le XIXe siècle pour que les classes populaires au sens large, puis les esclaves affranchis, intègrent cette notion de « peuple américain ».[réf. nécessaire]

Afrique[modifier | modifier le code]

Asie[modifier | modifier le code]

Océanie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e peuple, sur le site cnrtl.fr
  2. François Couplan, Les plantes et leurs noms. Histoires insolites, Éditions Quae, , p. 97.
  3. Thiesse [1999].
  4. Constitution du 4 octobre 1958 sur Légifrance.
  5. Gérard Noiriel [1992].
  6. Hervé Bazin, Vipère au poing, 1948, p. 113.
  7. Article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 sur le site Légifrance

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gérard Bras, Les ambiguïtés du peuple, Plein feux éditions, 2008.
  • Gérard Bras, Les voies du peuple. Eléments d'une histoire conceptuelle, Paris, Amsterdam, 2018. Présentation en ligne.
  • Déborah Cohen, La nature du peuple, Seyssel, Champ Vallon, 2010.
  • Gérard Noiriel, Population, immigration et identité nationale en France : XIXe-XXe siècle, Paris, Hachette, 1992, 190 p., (ISBN 2-01-016677-9).
  • Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé, Paris, Fayard, 2008, 606 p.
  • Jocelyne Streiff-Fénart, Philippe Poutignat, Théories de l'ethnicité, Paris, PUF, coll. Le Sociologue, 1995 (rééd. 1999), 270 p.
  • Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales - Europe XVIIIe-XXe siècle, Paris, Seuil, 1999 (rééd. Point histoire, 2001), 311 p.

Entretien[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Listes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]