Référendum québécois de 1995

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Référendum québécois de 1995
Type d’élection Référendum sur l'indépendance du Québec
Corps électoral et résultats
Inscrits 5 087 009
Votants 4 757 509
93,52 %
Votes exprimés 4 671 008
Votes nuls 86 501
Résultats
Carte
Résultats par circonscription provinciale. Le rouge indique le vote pour le Non, le bleu indique le vote pour le Oui, les couleurs plus foncées indiquent les plus hauts pourcentages.
Oui
49,42 %
Non
50,58 %

Le référendum de 1995 au Québec, tenu le , invitait les Québécois à se prononcer pour la deuxième fois, sur la souveraineté du Québec. Le projet fut rejeté par 50,58 % des votants.

Formulée par le parti majoritaire à l'Assemblée nationale, le Parti québécois, la question référendaire de 1995 était :

« Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de l'entente signée le 12 juin 1995 ? »

Le projet de loi est l'Avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec[1] déposé à l'Assemblée nationale du Québec le par Monsieur Jacques Parizeau. Cet avant-projet expose le projet politique que le gouvernement préconise pour faire du Québec un État indépendant, de même que la démarche pour y parvenir.

L'entente du sur la tenue du référendum avait été discutée et acceptée par le Parti québécois, le Bloc québécois et l'Action démocratique du Québec. Le texte de l'entente avait été envoyé aux électeurs par la poste durant la campagne référendaire. La loi référendaire indiquait que les négociations avec le Canada et les autres provinces ne devaient pas durer au-delà du , sauf décision de l'Assemblée nationale du Québec.

À 50,58 % des 4,7 millions de votes exprimés (sur un peu plus de 5 millions d'électeurs, soit 93,52 % des électeurs, un taux de participation record au Québec), le résultat a été « non ». L'écart entre le « oui » et le « non » a été de 54 288 voix.

Historique[modifier | modifier le code]

En , un premier référendum portant sur la souveraineté-association était organisé par le Parti québécois, élu en 1976. Avec une participation de 85,6 % des électeurs, 60 % des votants se prononçaient contre le projet du premier ministre René Lévesque.

Article détaillé : Référendum de 1980 au Québec.

Le camp souverainiste-associationiste défait, les partisans du statu quo et les nationalistes-fédéralistes du Québec tenteront à leur tour de trouver une solution au problème constitutionnel canadien, sans issue depuis 1931.

En , le premier ministre du Canada Pierre Elliott Trudeau organise une conférence constitutionnelle qui se termine par un échec, comme toutes les conférences précédentes. Un mois plus tard, le , le gouvernement fédéral de Trudeau présente un plan de rapatriement constitutionnel unilatéral. Le plan fédéral est mal accueilli par la majorité des premiers ministres provinciaux. Le , les premiers ministres de huit provinces se rencontrent à Québec afin de rendre public leur propre projet constitutionnel.

Trois provinces, le Québec, le Manitoba et Terre-Neuve contestent le projet de rapatriement unilatéral de Trudeau devant leur cour d'appel respective. Le Québec portera sa cause légale jusqu'en Cour suprême. En septembre 1981, les neuf juges du plus haut tribunal canadien rendent compte de leur verdict : le rapatriement unilatéral est légal, mais selon six des neuf juges, contraire aux conventions constitutionnelles. Le jugement force le gouvernement fédéral à obtenir l'appui des provinces, ce qu'il réussira à faire avec les neuf provinces anglophones, mais pas le Québec.

La nouvelle loi constitutionnelle est promulguée le . Le Parlement du Québec ne ratifie pas le document.

En 1984, le chef des progressistes-conservateurs fédéraux, Brian Mulroney, est élu en promettant de faire rentrer le Québec dans la famille canadienne « dans l'honneur et l'enthousiasme ». Trois ans plus tard, le nouveau gouvernement canadien proposera une offre au Québec qui deviendra l'Accord du lac Meech. L'Accord s'effondre en 1990, malgré l'appui du Québec qui s'y voyait reconnaître comme société distincte à l'intérieur d'un Canada renouvelé. Les sondages de l'époque démontrent un appui record à l'indépendance du Québec ; près de 72 % des Québécois sont pour. Même le premier ministre libéral du Québec, Robert Bourassa, prononce son fameux discours nationaliste sur la société distincte à l'Assemblée Nationale.

Puis, Bourassa signe une nouvelle entente, l'accord de Charlottetown, le . Par référendum, les Québécois ainsi que les autres Canadiens la rejetteront le .

En septembre 1994, le Parti libéral du Québec (fédéraliste) est battu aux élections législatives par le Parti québécois (souverainiste). Les élections accordent respectivement 47 sièges et 44,3 % des voix au PLQ, contre 77 sièges et 44,7 % des voix au PQ. Parmi les promesses faites par le Parti québécois du nouveau premier ministre Jacques Parizeau se trouve l'organisation dans l'année qui suit d'un référendum sur la souveraineté du Québec.

La campagne[modifier | modifier le code]

Affiche du camp du NON à Beauceville.

Principaux porte-parole du camp du OUI : le premier ministre du Québec et chef du Comité pour le OUI, Jacques Parizeau, le chef du Bloc québécois et Chef de l'Opposition à la Chambre des Communes à Ottawa, Lucien Bouchard, et le chef du parti de l'Action démocratique du Québec, Mario Dumont.

Principaux porte-parole du camp du NON : le chef du Parti libéral du Québec, Chef de l'Opposition à l'Assemblée nationale du Québec et chef du Comité pour le NON, Daniel Johnson, qui sera vite mis de côté au profit du Premier ministre du Canada, Jean Chrétien.

Alors que les sondages prévoient une victoire du NON en début de campagne, le OUI progresse ensuite fortement, remontée qui sera attribuée par plusieurs commentateurs dans les médias à la place de plus en plus importante que prend Lucien Bouchard. D'après les sondages de l'époque, de nombreux Québécois considèrent qu'il est plus charismatique.

Des sondages à partir de la mi-octobre donnent la majorité au OUI, ce qui intensifie la campagne fédéraliste. Jean Chrétien doit alors s'impliquer plus activement dans la campagne. Ce qui culmine avec la mobilisation d'avions et de bus en vue de rassembler des dizaines de milliers de Canadiens de toutes les autres provinces à Montréal le , qui y manifestent leur appui au NON et leur « amour pour le Québec ».

Les chroniqueurs politiques restent divisés sur les réelles conséquences de ce rassemblement : certains croient que des tenants du OUI ont été ébranlés par cette manifestation de solidarité et ont été amenés à voter NON, donc que cela aurait directement causé la victoire de cette option ; d'autres que plusieurs Québécois l'ont vue comme une intrusion du reste du Canada dans une affaire qui ne concerne qu'eux, ce qui les aurait amenés à voter OUI ; finalement, plusieurs considèrent qu'une combinaison de ces effets est possible.

Parmi les arguments des deux camps figurent :

  • l'importance du Québec dans la Confédération : 1/4 de l'économie, 31 % du PIB, 1/4 de la population, [réf. nécessaire]
  • le statut des francophones : Jean Chrétien promet un statut de « société distincte » au Québec.

Dans les jours qui précèdent le scrutin, des transferts de capitaux sont signalés, allant du Québec vers l'Ontario. Le dollar canadien baisse face au dollar des États-Unis.

Aux États-Unis, le secrétaire d'État Warren Christopher affirme que les liens commerciaux avec le Canada ne sont pas acquis pour le pays qui succèderait à la Confédération canadienne advenant l'indépendance du Québec[réf. nécessaire].

La monarchie canadienne et le référendum de 1995 au Québec[modifier | modifier le code]

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La reine Élisabeth II dans cette période référendaire pour le Québec et le Canada a de solides opinions personnelles sur les affaires canadiennes, mais comme un monarque non partisan, ne les exprime jamais en public. Nous pouvons savoir, avant le référendum, que la reine Elizabeth II croit fermement en l’unité canadienne. Faisant face à cette situation délicate, elle met en lumière son obligation politique d'être la Reine de tous les canadiens, même ceux dont les opinions diffèrent de son opinion. Ainsi, après avoir proclamé la Loi constitutionnelle de 1982, une des sources politiques du référendum québécois de 1995, elle tente de dévoiler son rôle de conciliateur en exprimant en privé aux journalistes son regret que Québec ne fasse pas partie du règlement[2],[3].

Les résultats[modifier | modifier le code]

Le scrutin se déroule le 30 octobre 1995[4]. Le taux de participation est de 93,25 %, ce qui est un record au Québec[5] . Avec 2 308 360 OUI et 2 362 648 NON, une différence de seulement 54 288 voix, le projet de souveraineté est rejeté par 50,58 % des votes.

Carte du référendum de 1995 par circonscription électorale. Le rouge indique le vote pour le Non, le bleu indique le vote pour le Oui, les couleurs plus foncées indiquent les plus hauts pourcentages.

Pour la première fois, les Québécois francophones donnent un appui majoritaire au projet du mouvement souverainiste avec 60 %[5] des votes enregistrés, toute origine ethnique confondue. En 1980, l'appui n'était que de 40 %.

Chez les allophones et encore plus les anglophones, l'appui au OUI est très faible ou nul, tout comme en 1980. Mis à part un appui substantiel venant des communautés haïtienne, sud-américaine, et maghrébine, les non-francophones votent NON[5].

L'analyse des votes des autochtones du Québec montrent que les Inuits et les Cris de la Baie James s'opposent majoritairement au projet souverainiste : 95 % de NON ont été enregistrés dans les deux communautés. L'appui est plus élevé chez les membres des autres nations autochtones qui n'ont pas un territoire à cheval entre la frontière du Québec et de l'Ontario, par exemple les Innus et les Hurons-Wendat.

Controverse au sujet du déroulement du référendum[modifier | modifier le code]

Peu de temps après le référendum, la controverse éclata au sujet du déroulement de la campagne et de la validité des résultats du scrutin. Durant le référendum, diverses irrégularités furent signalées au Directeur général des élections du Québec (DGEQ), Pierre-F. Côté. Après le référendum, celui-ci lancera une enquête pour tenter de faire la lumière sur ces questions[6].

Bulletins de votes rejetés[modifier | modifier le code]

Quelque 5 426 bulletins de vote ont été déclarés nuls dans la circonscription de Chomedey, soit 11,6 % de tous les bulletins. Comparativement, la moyenne dans l'ensemble du Québec était de 1,8 %. On a même vu dans un des bureaux de scrutin seulement 130 bulletins déclarés valides et 152 annulés[7]. Dans Marguerite-Bourgeoys, 5,5 % des votes ont été annulés et 3,6 % dans Laurier-Dorion. La publication de ces chiffres a fait scandale, surtout dans les médias anglophones.

Utilisant les moyens mis à sa disposition par la Loi électorale québécoise, le DGEQ, Pierre F. Côté, a conduit une enquête et ordonné l'ouverture des boîtes de scrutin pour soumettre les bulletins à l'examen d'un juge, Alan B. Gold. À la suite de l'analyse, Pierre F. Côté porta plainte contre 31 scrutateurs pour avoir rejeté de façon déraisonnable des bulletins de vote.

Le député libéral Thomas Mulcair ainsi que des universitaires de l'Université McGill ont prétendu que le décompte des votes avait été frauduleux dans tout le Québec le soir du référendum et ont reproché au DGEQ de n'avoir pris action que contre quelques personnes.

Le 7 juin 1996, le Directeur général des élections, Pierre-F. Côté, rend public le nom des personnes ou des entreprises qui ont reçu des constats d'infraction à la suite des enquêtes qu'il a menées relativement aux bulletins rejetés, à la "Marche pour l'unité" et au vote d'étudiants de l'université Bishop qui n'étaient pas domiciliés au Québec[8]. Au total, 118 constats d'infraction ont été délivrés à l'encontre de 80 personnes et de 11 entreprises[8].

Le rapport du DGEQ conclut que plusieurs votes ont en effet été rejetés sans raisons valables, mais que dans l'ensemble, les irrégularités étaient isolées. Vingt-huit scrutateurs et deux délégués officiel pour le Comité national pour le OUI[8] ont été poursuivis par le DGEQ en 1996 pour des manœuvres électorales frauduleuses, mais ils ont été jugés non coupables par la Cour du Québec. Cette cour a conclu que malgré des agissements contraires à la loi, il n'y avait pas de preuve de l'intention frauduleuse[9].

Les éléments présentés à la Cour n'ont pas permis de conclure à une tentative systématique de niveau national de rejeter des votes, ni à un « complot national » mais plutôt à des initiatives locales. Le jugement a été maintenu en Cour supérieure et en Cour d'appel[9].

Parmi les informations rendues publiques par le DGEQ, se trouve un tableau indiquant le nombre de votes rejetés durant les élections et les référendums au Québec depuis 1970. Le tableau suivant présente les données disponibles :

Année du vote Bulletins rejetés Parti nommant les scrutateurs
Élection générale de 1998 1,13 % Parti québécois
Référendum de 1995 1,82 % Parti québécois
Élection générale de 1994 1,96 % Parti libéral du Québec
Référendum de 1992 2,18 % Parti libéral du Québec
Élection générale de 1989 2,63 % Parti libéral du Québec
Élection générale de 1985 1,52 % Parti québécois
Élection générale de 1981 1,06 % Parti québécois
Référendum de 1980 1,74 % Parti québécois
Élection générale de 1976 2,05 % Parti libéral du Québec
Élection générale de 1973 1,81 % Parti libéral du Québec
Élection générale de 1970 1,95 % Union nationale

Source : Directeur général des élections du Québec

En 2000, l'avocat d'Alliance Québec, Michael Bergman, intenta une poursuite contre le DGEQ pour avoir refusé de permettre au groupe de pression d'avoir accès à tous les bulletins de vote du référendum. Malgré les résultats de l'enquête du DGEQ et les jugements des cours québécoises, Alliance Québec est convaincu que des bulletins de vote valides ont été rejetés systématiquement par le gouvernement du Parti québécois afin de voler le référendum de 1995. Alliance Québec a affirmé vouloir mener sa cause jusqu'en Cour suprême.

En mai 2005, Richard Le Hir, qui était ministre délégué à la Restructuration jusqu'au référendum, écrit que pour neutraliser l’endoctrinement des néo-naturalisés par les partisans du Non, une réunion du caucus du PQ décide de contacter les syndicats « pour endiguer la mer de Non »[10].

Implication du Conseil de la Souveraineté du Québec[modifier | modifier le code]

Six mois avant la tenue du référendum (mai 1995), le conseil fut établi par l'ex-ministre péquiste Yves Duhaime et une autre militante souverainiste bien connue, Louise Laurin. Malgré le très petit nombre de membres, le gouvernement du Parti Québécois lui donne 4 millions de dollars en août et octobre 1995[11]. De plus ce groupe reçoit lui-même un autre million de dollars de la part d'autre sources[12].

Le conseil utilise cet argent pour publier des pages de publicité pro-souverainiste. Ces dépenses n'étaient pas toutes couvertes par la loi référendaire car elles furent toutes dépensées avant le début officiel de la campagne. Ce comité avait l'avantage de savoir à quelle date exacte la campagne allait débuter, ce qui n'était pas le cas pour les autres.

Dépenses du Comité pour le NON[modifier | modifier le code]

La Loi référendaire québécoise indique que toutes les dépenses doivent être autorisées et comptabilisées par les comités du OUI et du NON après le dépôt du décret enclenchant la campagne. En 1995, les comités du OUI et du NON avaient chacun un budget autorisé de 5 millions de dollars canadiens. Une dépense effectuée par toute personne ou groupe autre que les comités officiels est illégale après le décret. Toute personne enfreignant cette loi est passible d'une amende allant jusqu'à 30 000 $. Le non-paiement de l'amende peut mener à l'emprisonnement. La Loi référendaire québécoise a été adoptée par l'Assemblée nationale du Québec quelque trois ans avant le référendum de 1980. Cependant les attraits de cette loi qui s'applique aux dépenses faites hors de la province fut déclarée non constitutionnelle par la cour suprême du Canada en 1997.

Le rapport Grenier, mis en place par le DGEQ, a publié ses conclusions sur les dépassement des dépenses du comité du Non le 29 mai 2007. M Grenier a fait état d'un montant d'environ 539 000 $ qui furent dépensés illégalement durant la période référendaire [13]. Quant aux dépenses possiblement illégales d'autre comités (Conseil de la souveraineté du Québec, etc.), des dépenses du gouvernement du Québec et du Canada, celles-ci dépassaient largement son mandat initial.


Implication du Conseil de l'unité canadienne[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Option Canada.

Environ huit semaines avant le vote référendaire de 1995, une organisation de lobbyistes montréalais nommée Option Canada est établie. Le groupe se compose d'hommes d'affaires et d'organisateurs politiques issus de trois partis politiques fédéralistes, soit le Parti libéral du Canada, le Parti libéral du Québec et le Parti progressiste-conservateur du Canada.

Selon les registres gouvernementaux, le groupe est incorporé le . Toujours selon les mêmes sources provenant du gouvernement fédéral et du gouvernement québécois, les fondateurs sont des membres actifs du Conseil de l'unité canadienne.

C'est Option Canada qui établit le Committee to Register Voters Outside Quebec afin d'aider des citoyens qui ont déjà habité le Québec à s'inscrire sur la liste électorale. Depuis 1989, une clause de la Loi électorale du Québec permet à d'ex-résidents du Québec de signaler leur intention de revenir au Québec prochainement et de voter par la poste avant leur retour. Le Comité, qui a opéré durant toute la campagne référendaire, a distribué des dépliants incluant le formulaire du DGEQ permettant de s'inscrire sur la liste d'électeurs. Les dépliants donnaient entre autres un numéro d'assistance sans frais qui était le même numéro que celui du Conseil de l'unité canadienne.

Après le référendum, le DGEQ, Pierre-F. Côté, a fait produire 20 poursuites au criminel concernant ces dépenses illégales et a ouvert une enquête sur Option Canada et ses agissements. À la suite d'un jugement de la Cour suprême du Canada intervenu le , plusieurs articles de la Loi référendaire du Québec ont été jugés inconstitutionnels, ce qui a conduit à l'abandon des poursuites du DGEQ[9]. . Les informations qui avaient pu être recueillies avant cette date ont été en partie rendues publiques dans son rapport annuel.

Le rassemblement de la Place du Canada[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Rassemblement de l'unité.

Le comité du NON a organisé un grand rassemblement de citoyens à Montréal, le 27 octobre, trois jours avant le vote. Quelque 150 000 Canadiens de toutes les provinces du Canada se sont donné rendez-vous à la Place du Canada, au centre-ville, pour ce que les organisateurs ont appelés un Unity Rally (« Rassemblement de l'unité»). Plusieurs politiciens fédéralistes ont participé à l'évènement, notamment le Premier ministre de l'Ontario Mike Harris, le Premier ministre du Nouveau-Brunswick Frank McKenna, le Premier ministre de la Nouvelle-Écosse John Savage et le Premier ministre de l'Île-du-prince-Édouard, Catherine Callbeck. Le chef conservateur Jean Charest, le premier ministre du Canada Jean Chrétien, le chef du Parti libéral du Québec Daniel Johnson se sont adressés à la foule pour l'occasion.

Pour faire venir toutes ces personnes des provinces canadiennes, les participants ont obtenu d'importantes réductions sur des billets d'avion d'Air Canada et des billets de train de Via Rail. Via Rail est une société d'État alors qu'Air Canada en était une anciennement. Cet argent n'a été ni autorisé ni comptabilisé dans le rapport de dépenses du Comité pour le NON.


Citoyenneté et Immigration Canada[modifier | modifier le code]

Selon les chiffres officiels de Citoyenneté et Immigration Canada, le nombre d'attributions de la citoyenneté canadienne au Québec passe de 23 799 en 1993 à 43 855 en 1995, soit un taux d'augmentation de 87 % en deux ans. Pourtant, on retrouve des taux similaires pour toutes les provinces à forte immigration. Dans un mémoire déposé à l'ONU, Gilles Rhéaume fait remarquer cependant que 11 400 certificats furent attribués dans le seul mois d'octobre 1995, soit 25 % du total annuel[14]. C'était la première fois que les résidents du Québec recevaient plus de certificats de citoyenneté que les résidents de l'Ontario. Le phénomène ne s'est pas reproduit depuis.

Questionné par un membre du BQ le 16 octobre 1995 au sujet des approbations accélérées des demandes d'immigration au Québec, le ministre Sergio Marchi a répondu que la même procédure existe lors de toutes les élections. La même chose s'est produite au Manitoba, au Nouveau-Brunswick et en Ontario. Pour l'élection Ontarienne de juin 1995, l'acceptation des demandes d'immigration a fait un bon de 45 % par rapport à l'année précédente[15].

Pour l'année 1996, l'on observe une baisse de 39 % des attributions par rapport à l'année précédente. Ces faits ont amené plusieurs personnes du mouvement souverainiste à la conviction que le référendum de 1995 a en réalité été gagné par le OUI. En juin 2005, les membres du Parti québécois se sont donné un nouveau programme politique qui déclare que si le peuple québécois porte le parti au pouvoir, celui-ci modifiera la loi électorale de sorte qu'il devienne nécessaire de présenter une carte électorale avec photo afin de voter et également que le Québec invitera des représentants de l'Organisation des Nations unies à superviser le processus référendaire dans l'éventualité d'un troisième référendum sur la souveraineté.

Liste électorale[modifier | modifier le code]

En 1995, le nombre d'électeurs s'étant inscrits sur les listes électorales est de 5 087 009. À ce nombre s'ajoutent 14 789 électeurs hors Québec et 4 962 électeurs détenus. Il s'agit d'un record puisque jamais le nombre d'électeurs au Québec n'avait franchi le cap des 5 000 000[16]. Les 4 757 509 qui sont allés voter représentaient un taux de participation de 93,5 %. Il y a eu 86 501 votes rejetés.

Plusieurs autres événements soulèvent de sérieuses questions du côté des partisans du Oui. En mars 1997, le Directeur général des élections du Québec constate qu'entre les personnes inscrites au fichier des électeurs au 30 octobre 1995 et celles inscrites au fichier des bénéficiaires de la Régie de l'assurance-maladie du Québec (RAMQ) à la même date, 338 104 électeurs n'ont pu être recoupés avec le fichier de la RAMQ[17].

La liste électorale permanente entre en vigueur par décret gouvernemental le 31 mai et 1er juin 1995[18]. Après la création de cette dernière, le directeur général des élections du Québec (DGE) radie en 1998 de la nouvelle liste 76 341[19] noms. Un formulaire fut envoyé à chacun et permit dans un premier temps de radier des milliers de noms.[pertinence contestée]

Dans le camp des souverainistes, plusieurs protestations se font entendre. Pour Gilles Rhéaume, « certains agissements du Gouvernement du Canada et de ses alliés ont directement contribué à faire inscrire et voter des personnes dans des conditions irrégulières voire carrément illégales[14] » ?. Dans la même veine, le site Vigile estime que sur 338 104 électeurs non recoupés, 56 000 noms ont été radiés, 106 000 ne peuvent être recoupées avec les données de la liste de la RAMQ et de ce nombre, 53 000 ne donnent jamais signe de vie[20],[21]. Considérant selon la loi que le nombre d'électeurs devant être radiés de la liste électorale était deux fois plus élevé que l'écart qui a permis au NON de remporter le référendum, sur cette base, des péquistes sont convaincus que « le OUI s'est fait voler le référendum »[21].

Malgré les récriminations des supporters du camp du Oui, le nombre d'électeurs recoupé de la liste électorale permanente s'explique facilement avec les changements démographiques d'envergure dans la province québécoise après les événements tumultueux du référendum. De la période des 3 recensements pour la province voisine de l'Ontario entre les années de 1991 a 2006, la province a maintenu un taux de croissance stable a 6,5%[22]. Mais le Québec lui passe de 3,5 % de 1991 à 1996, mais de seulement 1,4 % pour la période critique visée de 1996 à 2001, et de retour à 4,3 % de 2001 à 2006[23]. Le phénomène de l'exode des cerveaux est bien connu et plusieurs études la confirment[24]. La communauté anglophone à elle seule perd plus de 8 000 personnes par année entre 1996 et 2001[25]. La période de 1996 à 2001 comporte le plus bas taux de croissance jamais enregistré sur une période de 5 ans, mais légèrement inférieure à la période qui a suivi le référendum de 1980, une autre période d'exode important de la province.

Le Devoir au 19 septembre 1998 a également présenté l'un des cas de fraude référendaire au DGEQ. À la suite de l'enquête du DGEQ, 5 étudiants de l'Université Bishop's[8] à Lennoxville sont condamnés par la Cour pour s'être inscrits illégalement lors du référendum de 1995.

Conséquences[modifier | modifier le code]

À court terme[modifier | modifier le code]

Si le Québec reste pour l'instant dans la fédération, la faiblesse de la victoire du NON impose, théoriquement, au gouvernement fédéral et aux autres provinces, de tenir compte de la volonté des Québécois francophones de se voir reconnaître une identité propre.

Le discours de défaite de Jacques Parizeau devant les partisans du OUI, le soir du vote, suscite encore aujourd'hui la controverse, car il met en cause le vote des allophones (immigrés non francophones), ainsi que les dépenses effectuées par le camp du NON : « Nous sommes battus, c'est vrai ! Mais, dans le fond, par quoi ? L'argent et des votes ethniques[26] ». Fortement critiqué pour ce commentaire qui tend à dévaloriser certains électeurs pour leur origine ethnique, il annonce son départ de la vie politique le lendemain du scrutin, à partir du salon rouge de l'Assemblée nationale. Dès le lendemain, les deux candidats pressentis à la succession, Bernard Landry et Pauline Marois, annoncent tous deux qu'ils ne seront pas candidats si Lucien Bouchard, le chef du Bloc québécois, accepte de devenir chef du Parti québécois. Bouchard annoncera sa décision de le faire quelques semaines plus tard. Jacques Parizeau quitte son poste de Premier ministre du Québec en janvier 1996.

Le lendemain du résultat final, sur le marché des changes, le dollar canadien passe d'un cours de 0,7272 USD à un cours de 0,7518 USD.

À moyen terme[modifier | modifier le code]

Réélu en 1997, le gouvernement Chrétien dépose, en 1999, le projet de loi C-20, dite Loi sur la clarté référendaire[27], afin de donner des armes au gouvernement fédéral dans l'éventualité d'un autre référendum. Concrètement, le gouvernement de Jean Chrétien réclame une « majorité claire » en faveur de l'indépendance, signifiant qu'une victoire de 50 % + 1 de voix ne serait pas suffisante. L'Assemblée nationale réplique avec le projet de loi 99, dite Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec.

Une autre initiative du gouvernement fédéral par le Parti libéral de Jean Chrétien est de mettre en place un programme de visibilité du Canada au Québec, en participant financièrement à des évènements comme des festivals, afin de contrebalancer l'influence souverainiste dans la province. Ce programme est éventuellement connu sous le nom de Programme des commandites. Des allégations de dépenses injustifiées de fonds publics conduisent, suivant un rapport indépendant soumis au gouvernement fédéral par Sheila Fraser, le Vérificateur général du Canada, à une commission d'enquête sur le programme (dorénavant dans les mémoires sous le nom de Scandale des commandites), connue sous le nom du juge la présidant, la Commission Gomery, dont le rapport est publié début 2006. Le scandale des commandites aura déstabilisé fortement le gouvernement du Parti Libéral, gouvernement majoritaire depuis 1993. Le Bloc Québécois, parti souverainiste au niveau fédéral, remportera 54 sièges sur 75 au Québec, égalant ses meilleures performances lors du regain souverainiste de 1993, mettant le gouvernement libéral du nouveau Premier ministre Paul Martin en situation de minorité parlementaire. De plus, le scandale d'Option Canada et la montée des conservateurs au Québec contribueront à la chute du parti libéral comme gouvernement aux mains des conservateurs de Stephen Harper.

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Jacques Parizeau, « Loi sur la souveraineté du Québec », sur Assemblée nationale du Québec, (consulté le 12 mai 2017).
  2. http://crht.ca/elizabeth-ii-queen-of-canada/
  3. https://www.independent.co.uk/news/queen-falls-victim-to-radio-hoaxer-1579745.html
  4. « Référendums au Québec », sur electionsquebec.qc.ca
  5. a b et c Pierre Drouilly, « Le référendum du 30 octobre 1995 : une analyse des résultats », L'année politique au Québec. 1995-1996, Presses de l'Université de Montréal,‎ (lire en ligne).
  6. DGEQ. Bulletins rejetés - Marche pour l'unité. Rapport du Directeur général des élections. Référendum du 30 octobre 1995, Québec : Directeur général des élections du Québec, 1996. 64 p.
  7. Référendum 1995 : le Québec face à son destin | Les Archives de Radio-Canada
  8. a b c et d DGE Référendum du 30 octobre 1995
  9. a b et c Les grandes enquêtes DGEQ
  10. « Pour en finir avec 1995 »
  11. Philip Authier, "Sovereignty group got 4 million $," Montreal Gazette, 15 November 1995, p. 4.
  12. Claude Arpin, "Yes side mum on how it spent 4,8 million $: We don't want to give federalists too much information, Duhaime says", Montreal Gazette, 22 March 1997, A17.
  13. DGE-Option Canada et le Conseil pour l'unité canadienne ont dépensé illégalement environ 539 000 $ durant la période référendaire d'octobre 1995 (29 mai 2007)
  14. a et b L'Action nationale, Volume 90, Numéros 6 à 10 sur Google Livres Gilles Rhéaume, Les violations par le Canada des droits politiques des Québécois, Mémoire déposé à l'ONU et adressé à tous les démocrates, septembre 2000.
  15. . Par exemple, pour l'élection de 1994 de l'Ontario, l'acceptation des demandes a fait un bon de 49% par rapport à l'année précédente PARLIAMENT of CANADA
  16. ectionsquebec.qc.ca/francais/actualite-detail.php?id=1626 DGE-Référendum du 30 octobre 1995, communiqué du 23 octobre 1995 « Copie archivée » (version du 5 novembre 2015 sur l'Internet Archive)
  17. DGE-Établissement de la liste électorale permanente aucun électeur ne sera radié de la liste électorale du Québec, communiqué du 3 mars 1997
  18. DGE-Un peu d'histoire...
  19. Le directeur général des élections du Québec, Rapport annuel 1998-1999. Les radiations à la suite de comparaisons informatisées sont générées lorsqu'un électeur se retrouve inscrit en double sur la liste électorale. Avec la liste électorale permanente, il est dorénavant possible de savoir si un électeur qui s'inscrit dans une circonscription donnée est déjà inscrit ailleurs pour ne conserver qu'une seule inscription. Ce type de validation ne pouvait être fait lorsque la liste électorale était confectionnée au moyen d'un recensement porte à porte et qu'elle était dactylographiée dans chaque circonscription.
  20. Tableau chronologique du dossier aéroportuaire dans son contexte politique
  21. a et b Le PQ croit s'être fait voler le référendum 100 000 noms d'électeurs n'apparaissent pas sur la liste de la RAMQ par Pierre O'Neill.
  22. http://www12.statcan.ca/english/census01/products/standard/prprofile/prprofile.cfm?G=35
  23. http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/index.html
  24. https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/2467/a1.1g1101.pdf?sequence=1
  25. http://themetropolitain.ca/articles/view/504
  26. Ingo Kolboom, Maria Lieber, Edward Reichel, Le Québec: société et cultures, Dresden University Press, , p. 21.
  27. Loi de clarification, 2000, ch. 26 [lire en ligne (page consultée le 11 décembre 2009)].

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Michel Lévesque et Martin Pelletier, Les référendums au Québec : bibliographie, Québec, Bibliothèque de l'Assemblée nationale du Québec, , 82 p. (lire en ligne).

Documents officiels[modifier | modifier le code]

  • Avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec, Québec, Éditeur officiel du Québec, , 8 p. (lire en ligne).
  • Projet de loi sur l'avenir du Québec incluant la déclaration de souveraineté et l'entente du 12 juin 1995, Québec, Éditeur officiel du Québec, , 24 p. (lire en ligne) (entente).
  • Conseil privé de la Reine pour le Canada, Référendum à l'automne 1995 : stratégie préparatoire, Ottawa, Conseil privé, , 16 p..
  • DGEQ. Oui / Non. Québec, Référendum 95, Québec : Directeur général des élections du Québec, 1995. 48 p. (Texte du Oui)(Texte du Non)
  • DGEQ. Rapport des résultats officiels du scrutin. Référendum du 30 octobre 1995, Québec : Directeur général des élections du Québec, 1995. 751 p. (tableau synthèse en ligne)
  • DGEQ. Rapport du Directeur général des élections sur la mise en application de l'article 490 de la version spéciale de la Loi électorale pour la tenue d'un référendum. Référendum, 30 octobre 1995. Québec, Directeur général des élections du Québec, 1995. 57 p.
  • DGEQ. Bulletins rejetés - Marche pour l'unité. Rapport du Directeur général des élections. Référendum du 30 octobre 1995, Québec : Directeur général des élections du Québec, 1996. 64 p.
  • DGEQ. Le Directeur général des élections du Québec. Rapport annuel 1997-1998, Québec : Directeur général des élections du Québec, 1998, 75 p. (en ligne)
  • DGEQ. « Référendum de 1995 », dans La consultation populaire au Canada et au Québec. 3e éd., Québec : Directeur général des élections du Québec, 2000, p. 49-58. Coll. Études électorales.
  • DGEQ. Rapport d'enquête au sujet des activités d'Option Canada à l'occasion du référendum tenu au Québec en octobre 1995, Québec : Directeur général des élections du Québec, 25 mai 2007, 170 p. (rapport, annexes, et recommandations)
  • DGEQ. Option Canada et le Conseil pour l'unité canadienne ont dépensé illégalement environ 539 000 $ durant la période référendaire d'octobre 1995, Québec : Directeur général des élections du Québec, 29 mai 2007.

Livres[modifier | modifier le code]

Articles[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]