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Les changements climatiques contribuent à l'insécurité alimentaire chez les Autochtones

Quatre hommes plaisantent autour du feu en faisant griller de la viande.

(Archives)

Photo : Hooké

Bienvenu Senga

Les activités industrielles et les changements climatiques ont des conséquences importantes sur l’insécurité alimentaire dans les communautés autochtones du pays, selon un rapport.

Le document fait également état d’un grand attachement des Autochtones aux sources traditionnelles de nourriture.

L’Étude sur l’alimentation, la nutrition et l’environnement chez les Premières Nations (EANEPN), dont le rapport final a été dévoilé mercredi, a été menée en collaboration avec l’Assemblée des Premières Nations, l’Université de Montréal et l’Université d’Ottawa.

Entre 2008 et 2016, les chercheurs ont recueilli des données dans 92 Premières Nations de 11 écozones différentes du pays à l’aide, entre autres, d’entrevues et de cueillette d’échantillons d’eau et de nourriture. 

Une carte géographique du Canada colorée.Agrandir l’image (Nouvelle fenêtre)

Les participants à l'étude habitaient dans des écozones distinctes du Canada, ce qui dicte le type de nourriture traditionnelle auquel ils peuvent avoir accès.

Photo : Radio-Canada / Cam Gauthier

Plus de la moitié des familles autochtones consultées ont d'ailleurs de la difficulté à se nourrir adéquatement, peut-on lire dans le document, et les familles ayant des enfants sont encore plus touchées. Les chercheurs attribuent ce constat en partie aux prix des denrées beaucoup plus élevés dans les communautés autochtones que dans les centres urbains.

Sur les 6500 adultes qui ont pris part à l’étude :

  • 54,7 % ont indiqué que les activités forestières, minières de même que celles des industries pétrolière et gazière réduisent leur capacité à se procurer de la nourriture traditionnelle en pratiquant notamment la cueillette, la pêche et la chasse
  • près de 42 % des participants ont estimé que les réglementations gouvernementales constituent un obstacle à l’obtention de nourriture traditionnelle

L’étude révèle aussi que, dans les 11 écozones ciblées, la grande majorité des participants a souligné un impact significatif des changements climatiques.

Signe que les sources traditionnelles de nourriture représentent toujours une option de choix pour les Autochtones, 67 % des participants à l’étude ont indiqué prendre part à des activités de production ou de récolte de nourriture traditionnelle. En Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique, la proportion était supérieure à 70 %.

La bonne nouvelle [...], c'est que quand ces aliments traditionnels sont consommés, la qualité de l'alimentation est de loin meilleure, fait savoir le professeur en nutrition Malek Batal de l'Université de Montréal, qui est l'un des meneurs de l'étude.

Dans plusieurs écozones de l’Ouest canadien (maritime du Pacifique, la cordillère boréale, la cordillère montagnarde, la taïga des Plaines) ainsi que la taïga du Bouclier, la nourriture traditionnelle faisait partie du régime alimentaire des participants pendant plus de la moitié de l’année.

L’insécurité alimentaire

Selon le rapport de l’EANEPN, le taux moyen d’insécurité alimentaire de 47,9 % chez les ménages consultés était quatre fois plus élevé que celui qu’il était au Canada (12,2 %) en 2011.

Les taux les plus élevés ont été recensés en Alberta (60 %) et en Colombie-Britannique (50,2 %). 

À la lumière de ces données, les auteurs du rapport recommandent la mise en place de mécanismes qui permettraient d’améliorer l’accès aux sources traditionnelles de nourriture pour les Autochtones. 

Quelques recommandations des chercheurs

  • Reconnaître et inclure les valeurs et les priorités des Autochtones dans toutes les décisions des gouvernements locaux, provinciaux et fédéral en ce qui a trait à l’utilisation des terres, au développement, à la conservation, à l’habitat et à la protection dans le but de maintenir ou d’accroître la disponibilité et l’accès à de la nourriture traditionnelle de haute qualité. 
  • Reconnaître les droits prioritaires des Premières Nations à faire la récolte de nourriture dans leurs zones de préférence pour répondre à leurs besoins alimentaires, minimiser toute violation potentielle de ces droits de récolte et offrir une compensation appropriée en cas de violation. 
  • Assurer un soutien de la part de tous les ordres de gouvernement pour contrôler et protéger la santé des écosystèmes afin que les Premières Nations puissent obtenir de la nourriture traditionnelle en quantité suffisante.

Les chercheurs ont aussi trouvé des taux de diabète et d'obésité équivalents au double des moyennes canadiennes.

Le professeur Batal souligne que les gouvernements ont une grande responsabilité pour trouver des solutions aux défis auxquels sont confrontés les Autochtones.

Un homme aux cheveux gris qui porte des lunettes

Le professeur Malek Batal est l'un des meneurs de l'Étude sur l’alimentation, la nutrition et l’environnement chez les Premières Nations.

Photo : Radio-Canada

Ce sont des problématiques écosystémiques de haut niveau. Il faut avoir des interventions sur le revenu, sur l'accès aux aliments, sur la santé des espèces en regardant ce qui se fait au niveau de l'environnement, voir si on peut promouvoir des projets de partage, des programmes de subvention pour la chasse et la pêche.

Malek Batal, professeur au département de nutrition de l'Université de Montréal

Métaux et qualité de l'eau

Selon les chercheurs, des efforts devraient aussi être déployés pour mettre en garde particulièrement les femmes autochtones en âge de procréer contre les conséquences négatives de l’exposition au mercure. 

À l’aide de tests effectués sur des échantillons de cheveux, les chercheurs ont trouvé que les femmes autochtones et les personnes âgées de 51 ans et plus avaient davantage tendance à présenter des taux d’exposition au mercure plus élevés que celui établi par les normes de Santé Canada. 

Des quantités considérables de métaux nuisibles à la santé comme le plomb, l’uranium, l’arsenic et le sélénium ont été mesurées dans l’eau du robinet de 29 ménages autochtones. Les chercheurs recommandent l’entretien et l’inspection des usines de traitement d’eau et des tuyaux d’acheminement de façon régulière. 

Des moyens pour éviter que les produits pharmaceutiques ne se retrouvent en grande quantité dans les eaux de surface doivent aussi être prévus, selon les chercheurs.

Nord de l'Ontario

Autochtones